Il y eut un flash lumineux bleuté, suivit instantanément par un motif au cuivre que certains purent reconnaitre comme appartenant à l'un des multiples hymnes du Dominium. Ceux qui se retournèrent à ce moment vers l'holo-projecteur de Kaiserde purent alors constater de la présence d'une silhouette noble, posée là, droite, mains dans le dos.

Arkhangel Hismer, en personne. Il affichait un air grave, lèvres pincées, sourcils passablement froncés. Droit comme un I, il considérait calmement l'assemblée, fixant finalement sur regard sur l'officiel Spielton qui, comme les autres membres du personnel Kaiserde, s'était empressé d’exécuter un salut du Parti, l'air un peu crispé. Hismer abaissa une main, faisant signe aux hommes qu'ils pouvaient reprendre une position normale, et approcha du centre de l'assemblée, suivit de près par Spielton qui était venu se flanqué à sa droite.

"Lors de mon dernier passage, j'avais des plans d'avenir, et un infini mépris pour tout ce qui ne venait pas de Kaiserde."

Il pointa une rangé de fauteuil, continuant.

"Ici se trouvaient une jeune femme, blonde, qui lisait quelques livres depuis récupérés par mes services. Et là, si mes souvenirs sont exact, le commandant Korto, déjà égal à lui-même. Au centre de la salle, au niveau de la statue, des chercheurs Kaiserdiens s'affairaient. Nous venions de trouver cette station, nous avions décidés d'instaurer le Sénat Galactique, et certains - tous peut-être ? - voulaient le récupérer. C'était des temps plus simples."

Tout en parlant, il continuait son avancée lente, implacable, minutée et cadencée. Il se stoppa un instant devant le numéro B1, le salut d'un signe de tête respectueux, et reprit.

"Enfin, je ne suis pas venu ici pour parler de passé lointain et révolu, et je ne vous ferai pas l’affront de préciser que ma présence est liée à l'actuelle situation politique. Ce ne serait que pure perte de temps."

Il eut un très léger sourire, amusé par ses propres propos. Le Kaiserdien cultivait l'humour pince-sans-rire. Continuant à marcher, flanqué de Spielton, il prit place sur une sorte de promontoire destiné aux discours. Les soldats Kaiserdiens présent, presque par réflexes, vinrent de positionner autour de la projection holographique. Arme près du corps, ils tendirent leurs bras droits vers le ciel.

"Bien, passons aux choses sérieuses: Si j'aurai pu laisser Spielton exprimer l'avis du Dominium sur la question, sachez que je ne le ferai pas. Bien que d'une infini fidélité, l'officiel est en effet quelqu'un de cryptique et, de fait, un mauvais diplomate."

Son ton était calme, posé. Il s'en dégageait cependant une certaine gravité. A vrai dire, tout le personnage était comme ça. Qu'on le, haïssent ou qu'on l'admire, il fallait admettre qu'il dégageait une certaine force et un vrai charisme. Derrière-lui, Spielton faisait de son mieux pour rester neutre. Manifestement le Guide n'était pas au courant pour son intervention, et ça valait sans doute mieux pour sa tête.

"Sachez pour commencer que le Dominium a un profond respect pour l'ex-Gouvernement du Numéro B1, cependant notre allégeance est indépendante de la figure contrôlant la Capitale. Les guerres tournant autour de ce monde symboliques ne nous intéressent pas, et il est pour nous du devoir des gouverneurs d'assurer leur propre pouvoir. Le putsch des commandants Chazards et Red Star ne nous dérangent par conséquent pas."

Il laissa planer un court instant de silence, puis repris.

"Le Dominium, donc, se désintéresse de tout ces conflits. La seule chose l'intéressant c'est ce que font les vainqueurs. Leur politique. Dans le doute, et tant que rien est fait, nous donnons aux vainqueurs notre soutient politique. Ce soutient peut disparaitre voir se changer en volonté de renversement si la politique gouvernementale porte atteinte à Kaiserde de quelque manière que ce soit. Par ailleurs, le Dominium étant avant tout une nation de paix, de culture et de science, nous apprécions toutes les initiatives liées à l'égalisation des puissance. Ceci étant dit, considérons la situation actuelle:

Le gouvernement de Numéro B1 a été démit, et il va sans dire que la guerre va se prolonger.

Nos nouveaux gouverneurs sont là par la force. Ils ont donc autant de légitimité que le commandant B1, à bien y repenser. Ceux m'affirmant le contraire se rappelleront peut-être que l'ex-gouverneur est contre l'instauration d'une charte limitant ses pouvoirs et la mise en place de votes. Il est de fait aussi autocrate que nos deux nouveaux seigneurs. J'aime autant préciser que cette constatation n'a pas pour volonté de critiquer qui que ce soit.

Nos deux nouveaux dirigeants, donc, sont aussi légitimes que l'ancien gouvernement. De fait, Dominium ne les désapprouvera pas.

S'ils se montrent efficace et compétant, nous les soutiendront avec les armes qui sont les notres: La diplomatie, la plume, la parole. Comme nous l'avions pas le passé fait avec le Numéro B1.

Si, au contraire, ils se montrent inefficaces, mauvais, nous prôneront le renversement par la force et rassembleront les alliés nécessaires pour y arriver.

En l'attente qu'une des deux hypothèses vienne à se réaliser, le Dominium leur donne son soutient, par amitié pour les deux personnages, et ne s'impliquera pas plus que ça dans les guerres de pouvoir qui suivront."

Nouveau silence. Le Guide de Kaiserde parlait bien, d'une voix clair, forte et profonde. C'était un orateur doué.

"J'interviendrai peut-être à nouveau après l'allocution du "Presidente". Merci à tous pour votre attention, soyez juste."

L'holo-projecteur s’éteignit.