Dans le désert, le peuple nomade de la Cdte Crajnav avait un instant planté des piquets et monté des tentes... La tente principale était équipée de toutes les technologies que ce peuple connaissait, c'est-à-dire essentiellement celles pour se préserver de la chaleur.

Sous la tente, Mila avait fait tirer un rideau turquoise et or pour isoler Briséis qui commençait à haleter sous la douleur du début de la délivrance. Une musique douce emplissait le petit espace et absorbait tous les autres bruits ou gémissements, paroles, cris, de telle sorte que cet endroit paraissait silencieux au reste de l’espace sous la tente.

Mila n’avait fait venir que deux servantes de son peuple, l’une vêtue de bleu sombre, la matrone qui s’occupait pour l’instant de masser le dos et le ventre de la Prêtresse avec des onguents lénifiants à base de fleurs des sables, riches en senteurs et en pouvoirs médicinaux. Elle murmurait des incantations aussi chantantes et fluides que l’eau d’un ruisseau pour apaiser les douleurs naissantes et aider la femme brune à les contrôler…

…et l’autre, vêtue de blanc, celle qui accueillerait les enfants contre ses seins gorgés de lait.

Tout se passait bien.

Mila reparut dans la pièce principale, remarquant avec déception que certains de ses invités n’étaient pas venus, s’assurant que ceux qui étaient toujours là ne se lassaient pas et avaient tout leur content de boissons et amuse-gueule.

Briséis souffrait mais curieusement, tout était très acceptable. Elle avait eu raison de demander l’assistance du peuple de Mila Crajnav. Dans le sien, les souffrances n’étaient pas traitées, les Dieux étant des mâles, ils ne pouvaient penser à épargner cette souffrance aux femmes, prétendant que ce serait la porte ouverte à toutes les débauches… Dieux cruels, barbares, dont elle ne voulait plus !

Elle se mit à fredonner elle-même la ritournelle de la matrone qui la massait. Elle ferma les yeux un instant.

Elle sombra alors dans une somnolence qui fit passer le temps.

Dans la petite salle encadrée de rideaux, Briséis commençait à haleter sous le douleur. Elle avait des contractions terribles et malgré les massages de la matrone en bleu, elle avait les larmes aux yeux.

L'accouchement était proche. Briséis souffrait mais le seul reproche qu'elle faisait, c'était de ne pas tenir la main du père de ses enfants. Elle se doutait qu'il avait hésité à se montrer et elle en était à la fois contrariée et attendrie.

Il fallait pousser fort !

Elle se demandait quel était celui qui sortirait en premier de son ventre et s'amusait (si cela était possible) à faire des pronostics.

Ce n'était pas chose facile dans ce désert, mais à peine eut-elle émis son souhait que des serviteurs se succédèrent pour remplir un bassin à ses pieds.

Elle s'y accroupit avec l'aide de la matrone et de la jeune femme en blanc et expulsa son premier bébé dans un cri de délivrance.

Ce fut le garçon qui fut le premier né.

La fille prit son temps, mais déjà Briséis souffrait beaucoup moins. Son garçon sur son sein, elle le cajolait déjà.

La petite fille naquit elle aussi dans un dernier soubresaut du ventre de sa mère et hurla aussitôt. Briséis la prit également contre elle et lui chanta une berceuse.

Les bébés sur sa poitrine, Briséis s'endormit soudainement, laissant les femmes autour d'elle s'affairer à terminer le travail, comme si cela ne la concernait plus.

Elle aperçut Mila avant de sombrer dans le sommeil et lui sourit.

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Les yeux violets vacillaient de fatigue. Elle regardait le visage si tendre de son ami et lui prit la main.

Une étincelle de joie illumina son sourire.

D'une main tremblante, elle défit le bracelet blanc à la licorne qu'elle portait au bras et le lui tendit.

Briséis se tourna sur le côté pour ne pas le voir emmener ses enfants. Dans sa main, elle serrait très fort le fin tissu qui la recouvrait.