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La courbe mercure du croiseur de bataille s'éclairait comme un prisme à chaque laser tiré. Le silence de l'espace donnait au tout un air d’œuvre d'art. Il régnait au sein du champ de bataille une espèce de calme impie, et face au chaos organisé de la bataille on se retrouvait comme happé par un spectacle silencieux et pesant. Celui de centaines de meurtres.

La mort frappait en silence. Impériaux comme brigands.

Le métal se déchira dans un hurlement crispant tandis que le chasseur se retournait, mitraillant ses poursuivants. Deux esquifs du Torium s'embrasèrent et vinrent s'écraser sur la carcasse de la corvette tandis que l'Ace continuait sa route à travers la formation ennemi. Au loin, des transports fondaient vers un monde sans atmosphère.

L’étendard Jouvence© s'embrasa comme un tas de bois sec et l'enceinte du fort s'effondra partiellement. Les ombres s'enfoncèrent dans la faille, les hurlements suivirent.

Le croiseur de bataille pivota pour présenter ses canons aux forces ennemis. Les premiers tirs eurent des tracés parallèles à ceux qu'empruntaient les bombardiers. Ceux-là se dispersèrent au fur et à mesure que les pilotes choisissaient leurs cibles. Les DCA s'activèrent avec une légère latence qui permit aux assaillants d'éliminer plus de 50% de leur potentiel. Les missiles essaims ne pardonnaient pas le moindre retard.

Sur les planètes, c'était la panique. Les tirs d'artillerie soufflaient les bâtiments comme une boule écroule des quilles. Les troupes au sol étaient pour leur part confrontées à une arrivée constante de soldats impériaux : Les transports pleuvaient, libérant chacun des groupes opérationnels de fusiliers se joignant au flot noir d'infanterie mobile. Les chars et les méchas de soutient étaient envoyés depuis l'orbite via des capsules lourdement blindées visant en priorité les formations ennemies.

C'était comme moudre du grain avec une pierre.

En un mot comme en mille, la guerre faisait rage sur trois fronts, et leur dénominateur commun était l'Empire de Verre.

...

L'air des coursives de la Vestale Vive-argent, croiseur amiral de la Première Flotte d'Autodéfense impériale, était emplit de sueur et d'électricité statique. Le zèle de la bataille avait brièvement laissé place à l'euphorie de la victoire qui avait à son tour mutée au profit d'un sentiment sourd de stress: Le genre lié à l'attente des futures batailles, et du résultat de celles qui se déroulaient encore à des centaines de parsecs de l'emplacement du vaisseau.

Inaffectée par cette atmosphère, Scylla la traversait comme un brise-glace. Les commissures de ses lèvres étaient retroussées en un fin sourire aseptisé. Elle semblait pour ainsi dire satisfaite, et pour cause : Elle l'était, et à raison.

"Maréchal."

Claquement de bottes. L'officière venait d'arriver au bout d'un couloir plus large que les autres. Face à elle se trouvait une porte coulissante à double battant gardée par deux fusiliers spatiaux, reconnaissable à leur armure noir et à l'insigne triangulaire qui ornait leurs épaules gauche. Scylla jeta un bref regard aux deux soldats, à la porte qu'ils gardaient puis, lentement, rendit leur salut aux fusiliers.

Ils se détendirent.

"L'amirauté vous attend, maréchal."

Il y eut un bref silence. L'autre militaire se gratta le menton.

"Bon courage, madame."

Elle eut un léger rire, le genre indulgent, presque doux en fait.

Puis, sans une once d'ironie :

Et Scylla passa la porte.

Les amiraux et capitaines de la première, seconde, troisième et quatrième flotte d'autodéfense impériales s'étaient rassemblés sur le pont d'observation de la Vestale Vive-argent : Passé la porte, Scylla déboucha ainsi dans un poste de garde donnant accès à des capsules de sauvetages, deux salles vidéoconférence et une batterie d'ascenseurs permettant de rejoindre le pont de commandement du vaisseaux. Dans le prolongement de ce poste de garde se trouvait une grande pièce dont le plan pouvait grossièrement être résumé à un carré superposé à une parabole. La dite parabole était en fait un grand hublot panoramique. Si les impériaux évitaient généralement l'incorporation à leurs vaisseaux de failles structurelles telles que des hublots, rien ne leur interdisait d'en simuler via l'usage de technologies de pointe : Le hublot panoramique était en fait constitué d'une batterie d'écran rediffusant en direct une image captée par depuis l'espace. Dans l'état, on avait réglé les écrans pour diffuser des images capturées sur les différents champs de bataille impériaux. Le mur était ainsi constellé de mouvements de troupes, d'explosion, de duels aériens et de positions fortifiées.

Au centre de la pièce s'étendait une table en forme de pointe de flèche. Des consoles holographiques avaient été situées en sein même de sa structure et son centre était orné d'une magnifique projection holographique du secteur 1 sur laquelle étaient représentés les mondes impériaux, alliés, neutres, ennemis et les positions de chaque bataille. Ici et là, des petits cube holographiques permettaient d'avoir un "zoom" sur une région du secteur. Ainsi, à côté de chaque monde en bataille se trouvait un de ces cubes, et dans ces cubes, un compte-rendu en temps réel des forces en présence et des images des combats. L'amirauté était installée autour de la table, attendant la venue de la Maréchal.

Lorsqu'elle eut passé le poste de garde, Scylla jeta un bref regard panoramique à la pièce pour déterminer quelles personnalités étaient présente à cette petite réunion. Les quatre amiraux concernés avaient trouvés le temps de venir, et un petit nombre de capitaines de vaisseaux et de commandants étaient aussi là, généralement via holoprojection. Les autres étaient en pleine bataille, comme celles que diffusaient les écrans : Des images de transports de troupe aéroportés déversant un flot continu de soldats sur une espèce de monde rocailleux. Le tout était baigné d'une lueur bleu-rouge.

Scylla avança un peu plus en avant, et les officiers se levèrent comme un seul homme, portant leur main droite à leur cœur avant d’effectuer un vieux salut Kaiserdien, relique du peuple qui avait donné naissance à l'Empire. Scylla avait un sang purement Kaiserdien, tout comme l'impératrice. Peu d'humains de l'Empire pouvaient affirmer que leur sang l'était.

Les amiraux commandants et capitaines étaient regroupés par flotte. Scylla leur rendit leur salut et avança jusqu'à sa place, installée dos à l'entrée, face à l'écran panoramique. Elle hésita un instant, jeta un bref regard à la projection galactique et s'installa sur sa chaise, bientôt suivit des autres officiers.

Le nom était particulièrement éloquent, personne ne savait exactement qui en avait eut l'idée. Quoi qu'il en soit, personne n'avait jamais remit en question son utilisation.

Il y eut quelques chuchotement. Scylla reprit.

Encore des chuchotements, ainsi que quelques congratulations à l'adresse de l'amiral Teclys Blint et des autres hommes de la première flotte, qui avait menée l'opération.

Silence.

Nouveau silence. Tandis qu'elle parlait, les écrans avaient diffusés des images des différentes campagnes citées. Des hordes de soldats mitraillant des robots de combat et des insectes géant, des équipes réduites débranchant d'énormes machineries où installant des explosifs sur les parois de citernes grosse comme des immeubles, des combat spatiaux d'ampleur réduite au dessous de monde sans atmosphère, quelques combats urbains dans des villes ruinées où étaient encore accrochée des affiches représentant Jordis Baby...

Elle balaya la petite assemblée du regard, un petit sourire en coin apparaissait progressivement sur ses lèvres. Après un temps, le Maréchal fit claquer ses mains l'une contre l'autre.

Son regard s'arrêta sur les amiraux de la 3ème et 4ème flotte, et elle hocha doucement la tête.

Elle avait retrouvée son air froid, même si sa dernière phrase consistait sans doute en de l'humour. Il y eut d'ailleurs quelques rires. Elle attendit un court instant, demanda si qui que ce soit avait la moindre question puis, comme tout avait manifestement été très clair, mit fin à la réunion.

Désormais, elle devait rentrer sur Foyer. L'Impératrice voulait que soient remises des médailles. La première guerre de l'Empire était une victoire, sauf imprévu de dernière minute. Pourquoi se priver d'une célébration en bonne et due forme ?