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Cdte. Lakshmi
Respect diplomatique : 131 02/08/1017 ETU 10:33 |
Score : 15
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Fond musical recommandé ╔══════════════════╗ La Blonde et la Rousse ╚══════════════════╝ D'un amas de pierre peuvent surgir soit des fondations, soit des ruines. - Valeriu Butulescu La nuit jetait un voile sur le ciel devenu pourpre et à l'ouest les fenêtres commençaient déjà à s'illuminer. Le village le plus proche se trouvait à une vingtaine de kilomètres, perché plus haut dans les collines qui dominaient la vallée. Les journées étaient chaudes en cette période de l'année, mais pas suffisamment pour que la chaleur soit préservée pendant la nuit. La forêt ancestrale avait été conservée autour de la petite case où vivaient les deux femmes, isolées du reste du monde, profitant d'un repos mérité loin des intrigues, de la politique et de la guerre qui avaient été leur quotidien plusieurs années durant. Alitée, un sourire poignant son visage et une main au-dessus de l'arrondi de son ventre, la blonde contemplait les lumières naissantes par la fenêtre, tandis que la rousse était affairée à plier de nombreux vêtements et à tenter de les faire tenir dans une valise. La blonde se tourna soudainement vers l'autre femme et l’interpella. « Il faut que nous soyons prêtes lorsqu'il arrivera. » « Après toutes ces années, n'angoisses-tu pas à l'idée de revoir Sanjit ? Surtout pour un tel évènement. » « Je ne te mens pas lorsque je te dis que j'ai souvent pensé à lui. À bien de nombreuses reprises j'ai songé lui envoyer un message, une simple lettre pour lui dire que l'on allait bien mais je n'ai jamais pu m'y résoudre jusqu'à la semaine dernière. Il est une part importante de mon passé, et à bien des égards plus que toi, un souvenir âpre de l'existence que je menais avant. Mais il reste un pilier fondateur de la personne que je suis, je pense qu'il était grand temps qu'il sache que nous sommes encore en vie et surtout, qu'il sache ce que nous sommes devenues. » « Tu devrais prendre du repos. Il n'arrivera pas maintenant et je vois à tes yeux que tu es exténuée. Puis, si tu laisses venir le marchand de sable, le marchand de rêves n'en arrivera que plus tôt. » Pour signifier la fin de la conversation, la rousse pressa la main de sa compagne, baisa son front puis retourna à ses valises. Même si elle n'en fit jamais mention, car la question ne lui avait pas été posée, elle angoissait aussi à l'idée de revoir cet homme. Plusieurs années séparaient leur dernière rencontre et elle ne savait rien de l'écart qui s'était creusé entre eux. La dernière fois qu'ils s'étaient retrouvés au même endroit, elle était à bord du vaisseau de guerre de celui-ci, une frégate porte-nef des temps anciens, vestige d'une civilisation disparue à l'autre bout de l'univers à des temps immémoriaux ; elle devait embarquer pour une mission scientifique. Bien qu'elle eût appartenu au gouvernement d’une civilisation guerrière, elle n'avait jamais apprécié les navires de guerre. Elle trouvait leur architecture trop simple, trop accessible. Que l'on ne s'y méprenne pas, elle connaissait parfaitement l'utilité des longs couloirs, des escaliers omniprésents, des lumières blanches et des murs en acier nu, mais elle les détestait viscéralement, elle qui voyageait toujours en navette d'exploration. Pourtant, cette frégate était différente. Il ne s'agissait pas d'un simple vaisseau de guerre, un objet pensé et construit pour marcher sur des forteresses et faire tomber les rois, mais d'un vaisseau princier. Jadis, il avait certainement dû être la forteresse d'un illustre prince ou d'un roi émérite, mais la nature diplomatique du vaisseau ne faisait aucun doute. Les murs étaient recouverts de velours, ornés de motifs floraux tracés en or, des candélabres d'argent et de cuivre ainsi qu'une multitude de joyaux qui décoraient chaque meuble, signe de richesse et d'opulence. Personne ne savait d'où provenait ce vaisseau, il avait simplement été découvert siégeant au milieu de ruines lors d'une fouille archéologique qu'elle présidait. Le vaisseau était alors abandonné, couché sur son flanc droit qui avait été en partie détruit. La seule indication qui aurait pu l'aiguiller sur la piste du précédent propriétaire était le mot Kirasanta, gravé au laser sur le tableau de bord. Malgré des recherches intensives, aucune archive récente ou ancienne n'avait fait surface. Il fallait dire que lors de la découverte du vaisseau, Dieu faisait régner son Apocalypse depuis plusieurs décennies et la plupart des Archives Anciennes avaient été égarées ou détruites. Les technologies avaient aussi changé et si ce n'était pour la kyrielle de plus petits vaisseaux présents au sein de la forteresse motorisée, personne n'aurait envisagé qu'il puisse s'agir d'une porte-nef étant donné les différences viscérales qui la séparait des frégates modernes. Jamais elle n'aurait pu imaginer les évènements qui découleraient de sa descente de vaisseau. Elle devait indaguer sur l'origine d'anomalies gravitationnelles, qui perturbaient gravement le déroulement de la collecte de minerai effectué par l'Empire chaque cycle. Elle se souvint embarquer à bord d'une nef, pénétrer à l'intérieur de l'atmosphère et ensuite plus rien. Elle s'était réveillée dans la carcasse décharnée de la nef qu'elle pilotait, transie de froid et sans aucun moyen de communication. Consciencieuse, elle avait voulu mener à bien les objectifs de sa mission et conjectura la position géographique de l'anomalie gravitationnelle la plus proche. Plusieurs heures de marche la séparaient de son objectif et braver le froid mordant s'était avéré plus compliqué qu'elle ne l'avait imaginé. Malgré sa qualité d'érudite, son amour pour l'archéologie et la physique, rien n'aurait pu la préparer à ce qui se trouvait devant elle. Comme une fenêtre qui n'appartenait ni à cet espace, ni à ce temps, un pan de la réalité donnait sur un autre endroit aux antipodes de la planète glaciaire qu'elle arpentait : une vaste étendue de pâturages aussi verts que l'émeraude de ses yeux. Piquée dans sa curiosité, elle se résolut à franchir le pas de cette anomalie pour y découvrir l'autre côté, sans considérer l'éventualité que l'anomalie disparaitrait, plus tôt que tard. Esseulée sur une planète inconnue appartenant à une galaxie étrangère, il lui fallut plusieurs mois à se rendre à l'évidence : plus rien ne pourrait la ramener à son lieu d'origine. Cependant et ce contre tous les enjeux, Sara l'avait retrouvée et avait délaissé l'Empire qu'elle avait mené à son apogée, sans un regard en arrière. L'esprit embrumé par les souvenirs qui refaisaient surface, la fatigue la déroba à ses tâches et elle s'endormit aux côtés de sa compagne, non sans avoir posé l'oreille sur le ventre de celle-ci pour écouter le bruit du bébé qui s'y développait.
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Cdte. Lakshmi
Respect diplomatique : 131 02/08/1017 ETU 21:36 |
Score : 5
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Fond musical recommandé ╔══════════════════════════════════════════╗ Tout le bonheur du monde n'est qu'une illusion passagère ╚══════════════════════════════════════════╝ L'espoir est une mémoire qui désire. - Honoré de Balzac L'espace était aussi froid qu'à son habitude. Par-delà la fenêtre qui la séparait du vide intersidéral, il n'y avait rien excepté la multitude de points lumineux que tissaient les étoiles sur la toile noire de l'espace. Certains étaient aussi distants qu'inaccessibles, tandis qu'une maigre poignée appartenaient au secteur galactique dans lequel ils voyageaient - rien ne garantissait cependant qu'elle aurait le loisir de s'aventurer à son gré dans les systèmes solaires desquels ils étaient le point central. La mélancolie d'un passé révolu et d'années de bonheur s'était empreinte en elle. Après une brève réunion de formalité avec l'équipe de scientifiques, elle s'était éclipsée dans ses quartiers, puis avait condamné la porte avant de s'affaisser dans son lit et de verser toutes les larmes contenues en elle. Un masque en fer était posé à sa table de chevet, le même qu'avait l'habitude de porter sa blonde bien aimée lorsqu'elle émettait un communiqué de guerre à l'Assemblée ou encore lorsqu'elle pilotait son Croiseur Impérial dans les débris d'un champ de bataille. Elle s'était toujours dit que ce masque avait été porté lors des occasions où il était nécessaire de prendre du recul face à la situation, de se dissocier du monde extérieur et surtout, se disait-elle, pour contenir ses émotions et ne jamais les laisser transpirer alors qu'elles frappaient aux parois du cœur en cherchant à s'évader, s'exprimer. À plusieurs reprises, elle avait voulu céder à la tentation de se l'approprier et de le porter pour contenir sa propre tristesse, mais le masque ne lui appartenait pas, jamais il n'aurait pu emprisonner ses sentiments... Voilà huit ans qu'elle avait perdu sa femme aux suites d'une complication liée à la naissance de sa fille. Déjà huit années qui s'étaient écoulées depuis la naissance du seul rayon de soleil qui persistait dans un ciel d'argile. Elle ne pouvait s'empêcher de regretter ses choix et les conséquences imprévisibles qui en avaient découlées. Si seulement c'était elle qui avait porté l'enfant, jamais elle n'aurait eu à souffrir de la mort de l'être qu'elle aimait le plus... Ils auraient pu former ensemble une famille heureuse, se nourrir de ce que la terre leur apportait. Aujourd'hui, seule l'amertume persistait et parasitait les rares moments de joie qui ponctuaient son existence. Après avoir mis feu à la dépouille de feu sa femme et répandu ses cendres aux quatre vents, elle s'était à nouveau engagée en tant que Scientifique à bord d'une mission archéologique afin de rechercher des vestiges anciens en Clairvoyance. Reconstruire les contes oubliés en dépoussiérant les ruines ne lui apportait plus le même plaisir que dix ans en arrière, cela lui servait juste à ne plus penser à celle qui avait partagé sa vie. Cette volonté était mise à mal chaque matin, lorsqu'elle ouvrait les yeux et croisait ceux, pétillants, de sa fille. BOCK! Quelqu'un se heurta à la porte verrouillée. Cette distraction fit se volatiliser ses contemplations et rêveries. Elle ne put s'empêcher d'esquisser un sourire narquois, elle savait que par habitude Lakshmi avait tenté de se propulser dans la chambre en même temps qu'elle poussait la porte et s'était emboutie avant de réaliser que le verrou avait été posé. - Fond musical recommandé - « MAMAAAAAAAAAAAAAAAN! OUVRE LA PPPPPPPOOOOOOOOOOOOOORTEEEEE! » « J'arrive, j'arrive, attends... » La petite avait le même timbre de voix que son autre mère, cette forte autorité inhérente qui ne laissait planer aucun doute sur sa pérennité. Très succintement, elle jeta à la corbeille la pile de mouchoirs qu'elle avait laissé trainé au pied du lit et bondit du lit pour aller dévérouiller la porte tout en affichant un sourire de circonstances pour voiler le reliquat de tristesse qu'elle n'avait su évacuer. Elle souleva le loquet, une tige longue de quinze centimètres et épaisse de quatre et aussitôt fait, la porte s'ouvrit en battant, manquant de la projeter au sol. L'instant suivant sa petite chose lui sauta au bras, manquant de la renverser pour la seconde fois de la minute et se mit immédiatement à lui couvrir de bisous. « Maman! Maman! Tu sais quel jour on est? » « Oui, aujourd'hui c'est la Divali. » À ces paroles, l'enfant fit une moue de déplaisir. Apparemment ce n'était pas la réponse qu'elle attendait. Elle croisa ses bras devant son torse et détourna les yeux avant de secouer de gauche à droite sa tignasse de flammes. « Mais mamaaaaaaaaaaaaaaaaaaan! C'est pas Divali aujourd'huiiiiiiii! » « Mais si! Regarde le calendrier. On est le 11 novembre, il n'y a rien d'autre marqué dessus, non? Quel autre jour est-ce que ça pourrait être, dis moi? » À nouveau, Lakshmi détourna le regard, cette fois-ci par honte des larmes qui commençaient à perler à ses yeux. Elle tenta de s'arracher à l'étreinte de sa mère mais elle était trop jeune et trop faible pour réussir à repousser plus d'un bras simultanément. L'affection et l'amour transpiraient sur le visage de Sherra, dont les cheveux roux grisonnaient à la force de l'âge. Elle posa ses mains sur les joues de sa fille et lui pinça les joues tout en rigolant à voix haute. « Mais boboque ! Je sais très bien quel jour on est, c'est ton anniversaire aujourd’hui ! Tu veux que je te donne ton cadeau maintenant ou tu préfères attendre ce soir quand tu seras avec tes amis ? » « Maintenant ! Maintenant ! S'il-te-plaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaait ! » La réponse n'avait rien d'étonnant. Les enfants ont peu de patience pour ce genre de choses, notamment lorsqu'ils savent que les cadeaux ne sont que le vaisseau de l'affection qu'on leur porte - et surtout une chose nouvelle dont ils ne savent rien. Rien ne peut plus piquer la curiosité d'une jeune gens que la perspective de déballer un papier cadeau et d'y découvrir la surprise qui s'y niche. Elle était aussi soulagée de pouvoir lui offrir son cadeau maintenant, au lieu de plus tard : les autres jeunes occupants de la navette étaient plus âgés que Lakshmi de plusieurs années, le plus jeune ayant treize ans dans quelques mois. La mère desserra son étreinte et ordonna à sa fille de tourner le dos et fermer les yeux, afin qu'elle accède à sa "cachette secrète" où se trouvait le cadeau de sa fille, qui n'était autre que le cul du panier à linge. Elle en sortit une petite boite enrobée de soie rouge et claqua des doigts, signe que sa fille pouvait dès à présent se retourner. Sans se faire prier, cette dernière bondit sur le cadeau à la façon d'un prédateur affamé à qui l'on présenterait une proie blessée. De deux mouvements elle mit un terme à l'existence de la soie et déploya le carton de la boite pour en révéler son contenu. Elle plongea ses mains et en sortit une sphère en diamant pur sillonné par des flots de couleurs ; rouge, vert, violet, jaune, orange, elles y étaient toutes. Elle avait trouvé cet orbe sur le marché d'une planète luxuriante sur laquelle la navette avait fait halte pour recharger son carburant. Le marchand lui avait alors affirmé que chaque couleur représentait l'aura des précédents propriétaires de l'ornement et que ce dernier avait appartenu à sa grand-mère en personne et que faute d'argent, il devait s'en débarrasser et souhaitait en toucher un prix convenable. De toute évidence il s'agissait d’un tissu de mensonge, mais elle avait trouvé l'objet magnifique et en se concentrant bien dessus, il lui semblait distinguer un faible mouvement des filigranes à l'intérieur. Même si elle avait dû débourser une coquette somme, elle était satisfaite de son achat et savait qu'il allait correspondre à un cadeau qu'affectionnerait sa fille. Sa prédiction s'avéra exacte. Lakshmi se jeta sur le lit pour admirer son cadeau sous toutes ses coutures. Au-dessus de la couette, elle chercha sa position plusieurs fois avant de se rendre compte que son déconfort venait d'un objet sous la couette. Elle y glissa sa main et en sortit un masque en fer. Sa mère en eût immédiatement le visage blême. « C'est quoi maman? » « C'est rien... Rien du tout. » Lorsqu'il est question de curiosité, les enfants savent très bien reconnaitre les mensonges et Lakshmi n'était pas née de la dernière pluie. Aussitôt, elle répliqua. « C'est faux ! Je sais que tu mens maman. Dis moooooi! C'est quoooooi? » « C'est... C'est un masque. Il a appartenu à ta mère par le passé. Elle le portait souvent et j'aime le garder car c'est l'un des derniers souvenirs d'elle que j'ai. » Elle considéra un moment l'objet puis le tendit à sa mère. On pouvait lire le déchirement qui s'opérait en elle entre l'envie de le garder pour elle et celui de le rendre à sa juste propriétaire. « Tu veux pas me parler de maman un peu ? » Une question tant redoutée... « Elle te ressemblait beaucoup... Tu sais, il y a un temps, elle était à la tête d'un des Empires les plus puissants et les plus influents de l'univers. Attends... je vais te montrer. » De sa poche, elle sortit son Com-X et cala la fréquence sur celle de la galaxie de Devenir. Malgré les années, la distance et l'Apocalypse qui s'y déroulait actuellement, une des sondes qu'elle avait positionné en orbite de Zippo fonctionnait encore. En premier plan, on pouvait apercevoir Aura, sa terre-mère, en position semi-éclipsée derrière Zippo. Malgré l'omniprésence d'étoiles et des peuples qui habitaient les planètes de la Galaxie, aucune lumière ne brillait. « C'est de là d'où ta mère et moi venons. La planète que tu vois derrière, là, dit-elle en montrant Aura, c'est là où nous sommes nées. Derrière, c'est la Galaxie de Devenir. Tu es au courant que Divali est la fête de la lumière, mais sais-tu pourquoi en Devenir en ce jour toutes les lumières sont éteintes à l'exception de quelques planètes? » Avec des yeux aussi gros que des bulles de savon, une étincelle brillant au creux de ceux-ci, Lakshmi se tourna vers sa mère. Jamais elle n'avait affichée pareille curiosité. « Non! Pourquoi? Dis-moi! Je veux savoir! » « Il y a de cela quelques années, je m'étais perdue et ta mère me cherchait désespérément. Attristée de ne pouvoir mener sa fouille correctement, car plusieurs commandants condamnaient leurs systèmes par des tirs ioniques, elle était inconsolable. Après des mois de recherches avec son meilleur ami, un gars un peu allumé sur les bords, qui lui aussi disparut, elle finit par céder à la pression. Pour se donner toutes les chances de me trouver, elle fit l'impensable : le jour de la Divali, elle mit un terme temporaire aux barrages ioniques de la façon la plus remarquable qui soit ! Elle crama toutes les ressources de son Empire pour construire la plus grosse armée de croiseurs ioniques, de croiseurs impériaux et d'escadres kamikazes qui n'ait jamais vu le jour jusque-là. Sans l'ombre d'une hésitation, elle fit feu sur toutes les coordonnées de tous les systèmes de chaque secteur de la galaxie, sans exception. De ce qu'elle m'a dit, la galaxie brillait de mille feux et le feu d'artifice n'avait aucune mesure à ce qui avait jamais été fait. Elle fit ensuite appel à son armada hors-normes de croiseurs impériaux pour tirer à vue sur tout le monde, alliés y compris et envoya des escadres kamikazes explorer chaque planète en espérant que j'y suis. Coordonner chaque ordre lui avait pris plus de seize heures, durant lesquelles elle ne sut trouver ni repos ni répit. Bien qu'elle ne me trouvât pas, elle détecta une autre anomalie gravitationnelle comme celle qui m'a mené en Clairvoyance. En souvenir de ce jour maudit où des milliards de vies se turent soudainement, à chaque Divali la Galaxie de Devenir s'éteint totalement. En cela résidait la force de ta mère, la Grande Maharani de Devenir : sa volonté propre que nul n'aurait su faire plier. »
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Cdte. Lakshmi
Respect diplomatique : 131 05/08/1017 ETU 14:41 |
Score : 1
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Fond musical correspondant, pas forcément recommandé, même si il est bien ╔══════════════╗ La Trahison ╚══════════════╝ La tristesse n'est rien d'autre qu'un mur qui s'élève entre deux jardins. - Khalil Gibran « C'est fini, c'est terminé. » Ces paroles étaient aussi dures à avaler qu'un comprimé de 2g de paracétamol. Elles coinçaient au fond de la gorge et y laissaient un goût amer, une envie de pleurer qui s'installait un peu plus à chaque seconde qui passait. L'incrédulité s'était emprise de Lakshmi qui répétait en boucle que c'était impossible que ce fût fini, qu'elles avaient dû mal comprendre ce qu'ils voulaient dire lorsqu'ils coupaient tous les fond et qu'ils mettaient un terme définitif à la mission archéologique. La question qui revenait le plus souvent était « Pourquoi ? ». Pourquoi abandonner dès à présent, alors qu'une semaine plus tôt ils avaient mis la main sur le plus vieux temple qui n'avait jamais été découvert, alors que l'expédition se portait mieux qu'elle ne l'avait jamais été auparavant. Emportée par la colère, la tristesse et avant tout la déception, Lakshmi s'empara du Com-X de sa mère et s'enfuit avec, avant que celle-ci n'ait eu le temps de l'en empêcher. Elle courut, aussi loin et aussi rapidement que ses jambes pouvaient la porter. Les décors défilaient comme un film flou, scénographie floue à une escampette de circonstances. Elle ne savait pas où elle allait et elle n'en avait cure. Son cœur battait à ses tempes et saignait des rivières, dans cette mesure absolue dont les adolescents ont le secret. Elle s'enfonçait dans les dédales des rues, bousculant les gens, versant des rivières de larmes, traçant son chemin entre les voitures, disposée à atteindre l'autre extrémité de l'univers si elle le pouvait, là où on pourrait la laisser se claquemurer seule dans le mutisme et la souffrance absolue. Époumonée, elle s'arrêta et se laissa tomber à même le sol. Elle avait quelques mots à échanger avec le coordinateur de la mission, cet homme qui pensait avoir tous les droits sur elle, sa mère et toute la mission. D'où il pensait qu'il pouvait arrêter la mission du jour au lendemain sans prévenir personne, d'où il s'arrogeait le droit de détruire toutes leurs vies de la sorte. Et s’il ne voulait pas entendre raison par hologramme, elle irait chercher immédiatement un vaisseau en partance pour Minmax et irait lui faire entendre raison en personne, à coup de poings si cela s'avérait nécessaire. Putain ! Mais pour qui il se prenait encore ce con ? Sans se soucier de son apparence, de la transpiration qui avait trempé ses cheveux et son visage, des larmes qui avaient tracé des sillons à travers la poussière sur son visage, des yeux rouges, elle se mit en relation avec le Professeur Orthalaz. « Oui Sherra? » « C'est pas Sherra gros con! Tu te prends pour qui ? T'as cru que j'étais ta salope ou quoi, que tu peux faire ce que tu veux avec nous ? T'as vraiment cru qu'on comptait pour du beurre et que j'allais fermer ma gueule alors que t'es qu'un connard ? Hein ?! » « Calme toi Lakshmi, je vais t'expliquer. » « M'expliquer quoi, gros con ? Que tu nous laisse sur la paille parce que t'as des meilleurs projets pour l'avenir ? Que t'as décidé de passer à autre chose que l'archéologie ? T'as cru que j'allais me taire et que j'allais te laisser faire ? » « C'est pas comme si tu pouvais m'en empêcher. » Son ton était sec, dur et impassible. Sans énervement il avait énoncé la vérité la plus simple. Lakshmi essaya de balbutier des mots, mais sa voix se brisa et elle ne fit que regarder inutilement Monsieur Orthalaz. « Tu devrais parler avec ta mère. Elle t'expliquerait mieux que moi ce qui se passe. » « Je l'ai fait déjà ! Elle t'a traité de sous-merde et m'a dit que tu étais le mec e plus cruel qu'elle connaissait ! » « Ça m'étonnerait vraiment. Écoute, ça ne devrait pas être à moi de te le dire mais je n'ai pas envie que tu me harcèles toutes les demi-heures pour quelque chose sur lequel ni toi ni moi n'avons de pouvoir. Ce n'est pas moi qui ai mis un terme à la mission, c'est ta mère. Pa- » « MENTEUR! MENTEUR MENTEUR MENTEUR MENTEUR MENTEUR MENTEUR! Comment tu OSES ? » Las, Ortholaz mit un terme à la conversation et déconnecta son com-X. Après plus d'une centaine de tentatives échouées à essayer d'entrer en contact avec lui, Lakshmi jeta l'éponge. Elle était assise sur le sol en tailleur, au milieu d'un jardin qui n'était pas le sien. L'automne avait commencé à pointer son nez et la température chutait vite au crépuscule. Elle était partie dans l'instant présent, sans une seule pensée vers ce que pourrait lui réserver le futur et de facto, celui-ci lui réservait un vent polaire venu du sud. Sans vergogne, elle arracha un drap sur un étendoir et reprit la route qui la menait jusqu'à chez elle, pondérant ce que lui avait dévoilé Ortholaz. De toute évidence, il était un menteur de la pire espèce et sa mère la conforterait dans cette idée. Partout dans la rue, les regards se posaient sur elle, sale, crasseuse et couverte comme une malpropre et les deux heures qu'il lui fallurent pour atteindre sa demeure n'arrangèrent en rien son humeur déjà sombre. Lorsqu'elle pénétra, elle lança un regard noir en direction de Sherra et ne lui laissa pas le temps de s'exprimer avant de dire le plus simplement du monde. « Je sais tout. Pourquoi est-ce que tu m'as menti ? » « Parce que je voulais te protéger de la vérité. » Jusqu'à présent, Lakshmi avait cru que tout ce qu'elle avait entendu n'était que tissu de mensonges, des facéties prononcées par Ortholaz pour se protéger de l'ire. Elle était incrédule, plus rien n'avait de sens. Pourquoi sa mère aurait-elle mis un terme à la mission archéologique alors qu'elles s'y plaisaient toutes les deux ? Tout n'était que confusion. Devant le silence qui s'était installé et les yeux embués de sa fille, Sherra comprit qu'elle en avait beaucoup trop dit déjà. « Tu ne sais rien, c'est ça ? » « ... » « Avant que tu ne t'énerves contre moi, ce qui va forcément arriver, laisse-moi juste t'expliquer tout. Retiens-toi de me hurler dessus jusqu'à la fin et après je te permettrais de me dire tout ce que tu as sur le coeur. Pour le moment, écoute ! Quand tu es née, nous avons hérité de beaucoup d'argent. Nous aurions pu vivre tranquillement jusqu'à la fin de nos jours dans la maison que nous occupions alors, mais je ne voulais plus y vivre sans elle. La meilleure solution pour moi était de partir, de claquer la porte sur les souvenirs qui étaient devenus trop pesants pour moi, car ils me rappelaient un temps de bonheur où elle était encore vivante. Le meilleur moyen pour moi d'oublier était de voyager. Redécouvrir les étoiles, passer mon temps à m'occuper pour ne pas me noyer dans mes souvenirs. Je t'ai prise avec moi et je me suis dit que cette vie-là allait te convenir. Le problème dans mon plan, c'est qu'aucune mission ne souhaitait débourser de l'argent pour nourrir une enfant. J'ai donc décidé de monter ma propre exploration avec le Professeur Ortholaz comme chef de projet. Il manquait de financements et avait un savoir si immense, si seulement tu savais... Ensemble, nous avons monté l'expédition à la seule et unique condition que personne ne sache que j'étais celle qui possédait les fonds, car cela risquait de créer des tensions au sein de l'équipe. Je voulais que les autres ne me voient que comme leur collègue et n'adaptent pas leur attitude envers moi. Ça a très bien fonctionné pendant seize belles années. Mais il faut savoir que financer une telle expédition coûte cher. Le matériel coûte cher. L'entretien des vaisseaux coûte cher. Il faut aussi payer les gens. Et les fonds que m'a laissé Sarasvati n'étaient pas infinis. J'ai réussi à gratter des contrats par ici et par là auprès de contracteurs indépendants. Mais je ne pouvais pas continuer éternellement. Ça fait deux mois que tous les autres sont au courant et je leur ai demandé de ne rien te révéler. Pourquoi ? Je ne sais pas. Parce que j'avais peur de ta réaction, je ne savais pas comment tu allais réagir, je savais que ça allait briser ton petit cœur. Je ne voulais pas impliquer le Professeur à la base, mais il a insisté à prendre le blâme pour que ce soit plus simple pour moi. Par lâcheté, certainement, j'ai accepté et je t'ai menti. Parce que je ne voulais pas que tu me détestes. Voilà. Excuse-moi. Dis-moi tout ce que tu veux me dire... » « Tu es la personne la plus égoïste que je ne connais. Jamais je n'aurais pensé que toi, ma mère, celle qui me disait qu'elle m'aimait plus que tout, pourrait me mentir de cette façon et ça pendant seize ans. Toute ma vie n'est qu'un mensonge. Je te déteste. Je me tire d'ici, n'essaie pas de m'arrêter. » Sherra bondit sur sa fille pour l'arrêter car, dans cet état de colère, rien ne disait ce que Lakshmi aurait pu faire. Elle fut reçue par une gifle et un coup d'avant-bras de sa fille qui cherchait à se dégager. La rousse resta figée, coite, faible. Lakshmi ne prit que son porte-monnaie et le masque ayant apartenu à son autre mère avant de claquer la porte et de s'en aller.
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