"Oui, oui."

C'était Centz. Le trajet jusqu'ici lui avait pris une semaine - lui-même qui tenait en sainte horreur les trajets spatiaux, il s'était dit que, ce coup-ci, il allait devoir prendre sur lui tant la nature de la réunion importait.

Son visage affichait des traits tirés, profondément irrité qu'il était.

Il fallait comprendre quelque chose d'essentiel concernant Centz : il est un type acariâtre. Toujours de mauvaise humeur, jamais content, continuellement en train de tirer la gueule. Il en va de ses petites réflexions, de ses yeux au ciel, de ses remarques désobligeantes... Bref, Centz est un con.

Sa faible propension à se remettre en question et ses crises de nerfs aussi soudaines qu’incontrôlées vont d'ailleurs souvent conforter ce dernier était de fait.

Cependant, Centz dirige son propre combinat, et donc à la tête d'une organisation stellaire, il est normal que personne, jusqu'alors, ne lui ai fait remarquer son attitude, bien qu'il doive certainement être conscient de cette dernière, pas vrai ?

Cela dit, il était arrivé sur le planétoïde du batracien avec une flotte de guerre au complet : frégates et croiseurs en quantité maximales étaient au rendez-vous. La raison ? A son caractère s'ajoutait le fait qu'il était de nature paranoïaque - et xénophobe ; d'où sa flotte en orbite, de peur d'un sale coup de la part du xéno-batracien.

Il était arrivé à bord d'une navette accompagné de six gardes en exo-armures munis de lance-plasmas portatifs. Le minimum syndicat. Ainsi, il avait salué son interlocuteur.

"Commandeur Connan-Syphilis ! Salutations."

Il resta droit comme un I, et attesta de l'absence de Séverine.

"Notre quota féminin n'est toujours pas arrivé ?"

Séverène Sylvestrade venait d'entrer dans le bureau, accompagnée d'un petit drone sphérique qui lévitait derrière elle. La syndic progressait sur le tapis en plissant les yeux avant se stopper et de hausser les épaules une fois au niveau de Centz. Elle ne se priva pas de légèrement pousser du dos de la main l'un de ses gardes -ces hommes prenaient trop de place.

Elle marqua un temps puis éclata d'un rire plaisant et secoua la tête pour ensuite présenter son plus charmant sourire aux deux hommes. C'était parfaitement hypocrite de sa part, évidemment. Elle était une socialiste se battant chaque jour pour les droits des peuples et elle venait ici discuter avec deux civilisations qu'elle pouvait, pour parler simplement, effacer de l'histoire d'un battement de cils.

Ce qu'elle ne ferait pas. Les syndics avaient déterminés que l'alliance de l'Union avec ses voisins marchands permettrait à terme la libération d'un plus grand nombre de mondes que si l'on se contentait de libérer leurs populations soumises. C'était une logique arithmétique, donc pure.

De plus personne ici ne pouvait se permettre de lui faire du mal. Elle morte ou prisonnière, c'était toute l'Union qui entretenait en guerre, et comme Séverine était prudente, elle avait déjà assurée sa succession. Le rêve lui succéderait. Eux, par contre, ne laisseraient pas d'héritage s'ils venaient à se montrer un peu trop... Prudents avec elle.

L'heure des compliments d'ordre diplomatique était arrivée. Voila que la communiste faisait l'éloge de l'architecture des xéno-batracien.

Du coup, logiquement, c'était au tour de Centz de réagir.

En conséquence, il fit claquer sa langue sur son palais, leva les yeux au ciel, et lâcha un :

"Tss. Mouais."

Puis son regard alla se planter dans le sol, et il resta ainsi sans mot dire quelques secondes, avant de finalement relever les yeux, ajuster ses lunettes d'un air très résolu sans que l'on sache pourquoi, et de faire signe à ses gardes de se retirer d'un geste de la main.

"Soyons pragmatiques et allons à l'essentiel, voulez-vous ? Nous ne sommes pas venus ici pour parler architecture, me semble-t-il."

Elle acquiesça puis remonta ses lunettes sur son nez avant de joindre les mains devant elle.

"La même que notre collègue marchand."

Il lâcha un petit "tss" via sa longue contre son palais, et s'affala profondément dans un fauteuil. Il jugea ensuite les "boissons" d'un air profondément suspicieux, avant de ne pas en prendre.

Et il hocha la tête.

"Je pense qu'au delà de nos petites dissensions territoriales..."

Là, il jugea Syphlis en coin...

"Et idéologiques..."

Ce fut au tour de Séverine...

"... eh bien... L'objectif initial est, après tout, la pacification, non ?"

Il fronça les sourcils, puis prit un verre vert, dont il fit lentement tournoyer le liquide en le regardant avec un intérêt très maniaque sans néanmoins le consommer.

"Je pense que - de manière générale et inconditionnelle, j'entends - le but de toute guerre est de déboucher sur la paix, n'est-ce-pas ? Que paradoxalement, l'on se bat pour arrêter de se battre. Et je pense que c'est vers une cessation des hostilités qu'il faut tendre. C'est... un propos de vérité général.

Ça aurait pu être n'importe qui d'autre autour de cette table que j'aurais proposé la même chose."

Il reposa le verre, et fixa le xéno-batracien.

"Comme je pense à l'intérêt commun, je vais vous rendre vos mondes. L'on va aussi discuter du partage systémique pour éviter toutes colonisations croisées à l'avenir. Cela me semble à propos. Après ça, il restera encore quelques points à approfondir."

"Et c'est précisément avec cette vision des chose en tête qu'a été fondée la Ligue."

"Le fait est que la Ligue n'a pas pour objectif d'ingérer sur la politique intérieure des États la composant. Son but est plutôt de les accorder sur une politique diplomatique, coloniale et militaire commune. Pour faire très simple, nous ne cherchons pas à niveler les nations de la Ligue vers nos standards. Il s'agit plutôt de les faire travailler ensemble, avec leurs spécificité. Dans le but premier, évidemment, d'assurer une forme de paix et, ensuite, de nous composer un bloc militaire, économique et politique capable de faire pencher la balance à notre avantage.

En ce qui vous concerne maintenant, j'avais dors-et-déjà discutée de l'éventualité de votre inclusion au sein de la Ligue avec les représentants shiefeen et kir'Marek."

Elle marqua un temps et inclina légèrement la tête sur le côté.

"Le moins qu'on puisse dire est que les discussions furent brèves : Nous sommes tout disposés à vous intégrer dans nos rangs et très optimistes quant à ce qui suivra de cette alliance."