Une simple navette d’exploration tourbillonnait sur elle-même au milieu des débris, telle une feuille malmenée par le vent d’automne. Comme prévu, l’apocalypse avait tout dévasté sur son passage, ne laissant que mort et désolation dans son sillage.

Seul, perdu dans l’immensité de l’espace, l’homme dérivait, avec pour unique compagnie les bruits d’alarme et les lumières vives qui avaient envahi l’habitacle. Avec des gestes calmes et précis de celui qui a l’habitude, il s’activait pour reprendre le contrôle du vaisseau en perdition.

Ainsi passèrent de nombreux cycles, la navette incontrôlable poursuivant sa course folle vers l’inconnu. L’homme, lui, tentant simplement de survivre. Ils laissaient toujours plus loin derrière eux les vestiges de leur passé.

Une à une, alarmes et lumières s’éteignirent, plongeant le vaisseau dans un calme finalement plus oppressant que rassurant. Patiemment l’homme poursuivit ses réparations, seul au milieu du silence et de l’immensité insondable de l’espace.

Finalement, lorsqu’il eut fait son maximum, il s’assit et attendit, repassant en boucle dans sa tête le film des événements des derniers cycles de Souvenir. Instinctivement, il porta la main à la poche de sa veste, rassuré d’y sentir la forme familière. S’il avait compris bien des choses, des réponses lui manquaient encore et il comptait bien les obtenir coûte que coûte. Alors il ne pouvait pas se payer le luxe de moisir ici indéfiniment.

Et c’est là qu’il l’entendit, venant rompre ce silence auquel il s’était habitué, comme une réponse à sa prière muette.

D’abord un signal, régulier.

Le signal devint des notes, obsédantes.

Les notes devinrent un air, entêtant.

L’air devint une musique, envoûtante.

Et tandis que la navette dérivait dans l’espace, l’homme les yeux fermés, dérivait dans ses pensées, tous deux suivant le rythme imposé par la musique. Les notes les guidaient, la navette vers l'origine du signal, l'homme loin dans son subconscient, dans une sorte de transe.

Lorsqu’il rouvrit les yeux après un temps infini, ils étaient brillants, il savait.

Le signal, lui, continuait à diffuser inlassablement sa musique dans l’habitacle. Combien de temps avait passé, impossible de le dire, mais il remarqua tout de suite les nombreux points qui apparaissaient sur les radars auparavant vierges. Ils avaient détecté des vaisseaux, des planètes habitées, de la vie. Sa longue errance solitaire venait officiellement de prendre fin. La navette, mue par on ne sait quelle force, l'avait conduit en orbite au-dessus de la planète d’où était émis le signal, il n’avait plus qu’à se poser.

Alors qu’il sortait tranquillement du vaisseau, les yeux fermés, inspirant l’air à plein poumons pour la première fois depuis ce qui lui semblait une éternité, il sentit avant même de les voir, les armes pointées sur lui. Il ouvrit les yeux, arqua un sourcil et leva les bras, signe universel d’apaisement et reddition.

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Quelques cycles plus tard, une communication grésillante, de piètre qualité, envahit le canal de l’assemblée.

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