- Si nous sommes réunis en ce jour de grâce, c'est pour célébrer. Pour célébrer la Pax Salusienne, pour célébrer la fin des attaques sur notre nation. Nous avons connus récemment de nombreuses pertes, et la douleur que cet événement nous a procuré restera à jamais gravé dans la mémoire de chacun. Des milliards de morts à cause des antiques ennemis de la raison et du progrès, et parmi les vivants, nous ne comptons pas ceux réduits à l'obéissance forcée, ceux qui ont brutalement et contre leur volonté quitté notre belle nation. Mais les dommages touchent à leur fin. Nos racines sont celles de la révolution, et la souffrance est une triste mais inévitable conséquence de notre pensée et de nos origines. Celle des victimes, des martyrs, des opprimés qui se sont soulevés contre leurs oppresseurs. La nation qui était à la base celle des millions de fusillés pour avoir voulu être libre et heureux. Et cette révolution par la violence qui créa cet état amena notre Première Révélation. Celle qui nous montra que la violence n'est qu'un moyen à court terme, et que seul la liberté et le bonheur individuel permet d'atteindre l'harmonie collective et l'optimale société. Nous formons un parfait tout, car nous formons un tout heureux de faire parti de cet ensemble. Personne n'est forcé ou entravé. Et c'est cela qui nous montra la voie pendant nos débuts interplanétaires. Nous ne devons qu'avancer par le commun accord et plaisir d'un peuple éduqué et conscient du monde. Un peuple que nous avons l'honneur, et la joie de représenter à travers la galaxie. Nous, cette conscience collective du nom de Canaan, cette représentation de la mémoire de tout une série de personnes ayant partagé les mêmes idéaux. Cette conscience collective qui nous permet humblement d'être le porte-étendard de cette nation.

- Ces massacres et cette trahison nous aura appris la Seconde Révélation : être pacifique n'empêche pas d'être capable de destruction, et être optimiste n'empêche pas d'être pragmatique. Nous apprendrons encore et encore, comme nous l'a montré ce tragique événement jusqu'à l'Apocalypse. Les apprentissages les plus importants ne semblent pas pouvoir être appris grâce à l'observation et l'étude, mais seulement par la souffrance. Nous devons donc apprendre à faire pousser les germes du progrès dans ce mal nécessaire.

- Nous avons tous ensemble souffert. Nous avons tous ensemble appris. Nous devons donc tous évoluer. Et l'administration et le gouvernement n'étant que des outils nous permettant de régir notre collectif, ces derniers doivent évoluer avec nous. Dorénavant, il y aura deux nouveaux corps gouvernementaux. Les Observateurs, s'occupant d'ingurgiter le maximum d'informations possible provenant de la nation, et donc de la vie commune et personnelle de chacun, pour trouver chacun des problèmes et troubles intérieurs, afin qu'avec cette aide nous puissions faire avancer la société en ayant une meilleure vision, plus complète. Les Purgateurs, un groupe de taille bien plus modeste, quand à eux, s'occuperont de régler certains problèmes non-solvables sans leur action. En effet, n'importe quel être vulnérable est capable d'erreurs, et encore plus ceux avec une mémoire unique, leur vision et pensées étant forcément alors calquée sur leur très courte temporalité. Les Purgateurs seront alors sous nos ordres direct, notre pluri-mémoire s'étendant sur des générations, des siècles, nous permettant une synthèse de réponse nécessairement plus équilibrée et surtout avec une vision sur le long terme impossible autrement. Ces derniers régleront alors les problèmes non-résolubles autrement, la Purge étant un mécanisme nécessaire. Cela s'accompagnera évidemment d'une restructuration du gouvernement et de l'administration, pour acquérir plus de flexibilité. Nous espérons et nous pensons que vraisemblablement, cela vous plaira et cela sera pour le mieux du collectif.

- Vous parlez de cette manière franche sur un sujet si important nous est plaisant et semble être la meilleure manière d'échanger. Dorénavant, nous organiserons cela de manière fréquente. Sur ce, gloire à New Fenisië !

- Nos compagnons, nos compatriotes, nous vous saluons. Nous, Canaan. Si nous nous réunissons ici à cette date, c'est pour inaugurer le retour en tant que capitale du berceau de notre civilisation, Fenisië.

En effet, après de multiples péripéties, cette planète se trouva occupée non plus par notre ancien ennemi la commandante Katarina Skull, figure de proue de notre Xénocide, mais par de vulgaires brigands. On soupçonne d'ailleurs dans cette occupations la présence de partisans de l'ancien régime tyrannique de cette planète. Nous avons donc sans attendre envoyé nos flottes récupérer le contrôle de notre Planète-Mère, celle qui féconda notre peuple. Qui nous féconda.

- Elle est alors redevenue notre capitale, comme elle l'a toujours été en dehors de cette période de crise, cette période où nous avons du créer New Fenisië, qui restera pour toujours une marque, une cicatrice de notre histoire. Cela marque le retour total de l'unité de notre nation. Nous avons traversés de terribles moments, et nous avons approché l'extinction de notre civilisation. Mais grâce à notre courage et notre détermination, nous nous en sommes sortis. Et nous voilà, grandis par cette douloureuse épreuve. Nous aurions tous voulu éviter cela. Mais c'est arrivé, et nous ne pouvons changer cela. Alors nous nous en sommes accommodés. Nous sommes meurtris, mais cela nous permets d'être plus grandiose que jamais.

Et ici, nous vivons dans une grande plénitude. Car n'oublions pas, l'Apocalypse approche. Nous avons fait ce que bon nous semblais, nous avons propagé nos idées, répandus le bonheur et la technologie au maximum, mais nous savions qu'irrémédiablement, nous allions tous disparaître, dans ce qui détruira tout. Nous allons être honnêtes avec vous : avec nos récentes découvertes scientifiques, grâce à cette ouverture forcée à la galaxie qui nous a propulsé dans tout les domaines, nous avons la possibilité d'essayer de déjouer l'Apocalypse. Nous pouvons faire ce choix. Mais nous ne le ferons pas.

- En effet, nous pourrions le faire, mais pas pour tout le peuple, uniquement pour nous et possiblement quelques-uns de nos plus fidèles et talentueux compagnons. Cela serait contraire à notre mode de pensée, créer une déchirure dans notre nation, entre les rares rescapés et les milliards de disparus. Nous ne pouvons pas nous permettre cela. Et plus que cela l'acte en lui-même nous semble futile. En effet, nous pensons que le bonheur et l'avancement n'a de sens que si nous sachons qu'il y aura une fin à tout cela. Sans cette borne plus ou moins indiquée, nous tomberions dans une apathie. Car après tout, nous aurions tout le temps que nous souhaiterions, pourquoi donc nous devrions agir ? Cette idée nous terrifie. Nous préférons donc disparaître, avec vous, tous être détruits.

Nos idées survivront, nous en sommes convaincus. Ce pour quoi nous nous sommes battus, ce pour quoi d'autre avant nous se sont battus, ce pour quoi de nombreuses personnes encore se battront. Car nous savons que cette recherche du progrès, du bonheur commun est quelque chose de viscéral, que ressent invariablement des espèces vivantes et mortelles au cour du temps, comme nous l'avons observé. Nous avons vécu, nous avons exulté. Nous devons maintenant accepter la fatalité de la mortalité. Sans quoi notre existence perdra toute saveur, et sera pire que la mort. Nous vous demandons donc, avec nous, d'accepter avec plaisir cette mort. Cette mort messianique, nécessaire.

Nous accueillerons avec le sourire l'Apocalypse rédempteur.