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Cdt. Roi Écarlate
Respect diplomatique : 44 ![]() 05/01/1017 ETU 21:14 |
Score : 7
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"Chantes, chantes les éons, Et voyez comme ils fuient ! Les inconstants et les traitres, Ils courent, priez le Roi !" Les chants impies résonnaient depuis plusieurs heures déjà, des chants austères prononcés d'un ton solennel et invariable par une foule d'individus décharnés et déformés, couverts de haillons, creusant à l'aide de pelles ou de leurs mains la pierre rude d'un désert noir peint en rouge par de véritables lacs de sang. Il y avait eut une bataille ici, une bataille terrible qui avait scellée le destin d'un monde entier et, par la même, massacré l'immense majorité des forces appartenant aux différentes factions luttant. Ainsi, celle qui pouvait pour l'heure s’enorgueillir de la victoire était réduite en tout et pour tout à quelque trente mutants creusant la pierre noire, deux ou trois prêtre à peu près intouchés par les mutations, et leur leader, qui avait eut la sagesse d'arriver après la bataille. L'homme s'appelait Reynal Farwall. Il avait commencé comme une espèce de dément itinérant, un anarchiste de génie, dangereux et manipulateur semant le chaos sur sa route. Puis le Roi lui avait parlé, et lui avait fait don d'une mission sacrée et de grands pouvoirs. Depuis il était devenu l'homme qui rode, l'homme noir, encore la main rouge, l’œil du Roi. Pour reprendre les psaumes de son culte "Le maître sépara l'âme du corps, et l'homme insolent ne fut plus. Alors il apprit le nom du Roi, et naquit l'espoir et l'homme noir." Il était devenu le prophète d'une aberration sans nom et sans age, le représentant sur terre d'une sorte d'entité cosmique qui, à en croire ses rares visions, était à l'origine de l'immense majorité des maux frappant l'humanité de la planète. Cette dernière en était à peine à l'ère atomique. Plusieurs gros états se tiraient la bourre et la préoccupation des habitants n'était pas tant l'espace que les conflits interétatiques bas du front. Reynal Farwall, qui ne se voyait pas trop devenir un simple chef de secte parmi tant d'autres, complota tant qu'il put pour gagner de l'influence mais n'eut pas à se donner plus de mal que ça. La fin du monde, d'un monde, intervint sous la forme d'une puissante épidémie, et guidé par son maître, Reynal releva l'humanité. Bien entendu il y en avait quelques-uns qui ne voulaient pas de lui et de son dieu, qui s'accrochaient à de vieille croyance où à la technologie. Des idiots qui ne comprenaient pas que le monde avait changé. Ainsi, alors que la terre pourrissait et que tout ce qui était de chair dégénéra lentement, les hommes se livrèrent une ultime bataille, longue de dix ans. Au même titre que son Roi le guidait de loin, Reynal le prudent guida ses troupes via plusieurs pantins, pions et hommes de paille. Il continuait pour sa part à rôder à et rallier plus de serviteurs. "Et ils connurent le nom du Roi." C'était un homme grand et musculeux, habillé d'un pantalon délavé, de longues bottes, d'une veste en jean et d'un chapeau à bord plat. A cause de son sourire dément et de ses yeux d'acier, il ressemblait un peu à un cowboys infernal des années 70's. Le tout dissonait délicieusement de son rôle de saint homme. Les chants se stoppèrent, un prêtre approcha de l'homme en noir. Ce dernier méditait, flottant quelques centimètres au dessus du sol. "Maître, c'est terminé." L'homme en noir se retourna lentement, son sourire fit frémire le prêtre qui détourna bien vite le regard et, plié en deux dans une posture de pure servilité, battit en retraite pour rejoindre les autres mutants. Reynal se posa au sol, épousseta sa veste et avança à grand pas pour rejoindre ses hommes sans se départir de son sourire. En effet, ils avaient terminés. Au centre de la petite foule se trouvait désormais non-plus un sol rocailleux et sombre mais un profond trou, creusé à la façon d'une carrière, menant jusqu'à une surface noire et lissa. "Apportez un étendard au maître !" Les mutant s'agitèrent, l'un d'entre-eux finit par trouver ce qu'il cherchait parmi les cadavres des combattants. Un drapeau, trainant dans le sang. Il l'amena jusqu'à la main rouge, l'homme qui rode, et ce dernier se jeta dans le trou. Il se réceptionna doucement, usant de ses pouvoirs de lévitation, et posa le drapeau au sol. Il s'agissait d'une toile blanche marquée d'un grand œil rouge. Le sang rendait le motif presque méconnaissable. Reynal posa une main sur la surface noire, et il y eut un tremblement terrible qui secoua au bas mot toute la région sur des kilomètres. Les mutants, prit de panique, s'enfuirent sans demander leur reste, bientôt suivit par les prêtres. L'homme noir, pour sa part, éclata d'un rire hystérique et clair qui raisonna longtemps, très longtemps dans l'immensité noire du désert. Et ils connurent le nom du Roi.
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Cdt. Roi Écarlate
Respect diplomatique : 44 ![]() 06/01/1017 ETU 19:56 |
Score : 5
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Carcosa n'était rien de plus qu'un rêve, une image que l'on avait imprimé sur la réalité. Le vague souvenir d'un lieu détruit depuis des millénaires par des êtres mauvais et ambitieux. Et pourtant, elle existait, aussi solide et vraie qu'elle l'avait été par un lointain passé. Si la description la plus exacte de la capitale du Roi serait de la comparer à la lumière bien visible d'une étoile, lumière remontant à plusieurs millions d'année, sa réalité tangible, elle, était indéniable. Installée entre un océan sans vague et un désert gris, elle était posée au centre d'un tamier de marbre dont la taille semblait varier d'un moment sur l'autre. Ce damier était ce que l'on nommait le "Labyrinthe", car quelqu'un en avait fait construire un sur l'ensemble de sa surface. Impraticable, habité par des êtres innommables, le dédale ne suivait aucune logique réelle, se contorsionnant dans des figures indescriptibles. Pire, des figures irreprésentables. Sa simple existence perturbait l'écoulement du temps et mettait en danger ce qui venait du monde de la logique et de la science. Pourtant, il existait des moyens de la traverser, et pour cause : Il l'était quotidiennement, si tant est que le temps ai vraiment le moindre sens au sein de ses murs cyclopéens. Car la Ziggourat seule était inéluctable, et si tout son royaume était à la fois proche éloigné, seule sa présence comptait réellement. Véritable balise installée au centre de Carcosa, sa vérité ne pouvait être ignorée, et qui l'observait l'avait en son cœur. Et qui l'avait en son cœur ne pouvait plus se tromper : Tout chemin devenait une route directe pour le temple. Elle était, se définissait par elle même et se suffisait amplement. La Ziggourat était sa propre architecte, sa propre mère, et son propre père. Elle était tout à la fois ses sœurs, ceux qui l'avaient théorisés dans un passé antédiluvien et qui, dans un futur post-apocalyptique, la rénoveraient. Elle définissait l'entropie, l'existence, la naissance, la mort, le chaos et l'ordre. Elle correspondait à une très juste définition de la folie, de la peur, de l'horreur, mais aussi de l'accomplissement, du bonheur. Elle était le désire, et le remplissait. Elle était le besoin, et y répondait. Un homme qui voyait la Ziggourat n'avait plus besoin de rien, elle emplissait tout son esprit, comme une tumeur galopante et, en l'espace de quelques secondes, ou était-ce des siècles ?- finissait pas s'en échapper, affectant le corps puis ce qui se trouvait autour. C'était un formidable parasite. Et aussi, de manière bien plus prosaïque, la capitale de Casse-roi-roque, le siège du gouvernement du Roi. Ainsi-donc, en son sein se trouvait ce que l'on pouvait grossièrement appeler le bureau de Reynal Farwall, et si l'on pouvait trouver amusant de noter que le seigneur de maître de la folie de ces terres était l'homme le plus prosaïque qui soit, la majorité de ceux amenés à le côtoyer du fait de leur haut rang trouvaient ce contraste proprement terrifiant. Comment pouvait-on à la fois être le maître des folies, régner sur une déchirure de l'espace et du temps, répandre la bonne parole du Roi par-delà-les-esprits et se contenter en souriant, d'une vie simple, d'un bureau avec baie vitrée, table en bois massif et lecteur-CD ? Grand mystère, mais qui importait peu : Reynal avait beau être "prosaïque" il n'en restait pas moins le prophète, le messie. Le sauveur, celui qui porte Sa parole, qui effectue Sa volonté et qui érige Son empire, Ses temples. Il était l'homme aux grands pouvoirs, aux responsabilités immenses. La musique résonnait à fond dans le bureau. Reynal, mains dans les poches de sa veste en jean observait Carcosa et, loin derrière les derniers building, la Ludnt, le grand pont qui traversait les deux kilomètres qui séparaient les rives du fleuve et, enfin, le damiers et le labyrinthe. Il était difficile de savoir à quoi il pensait. A son empire? A la récente tournure des événements ? Peut-être communiquait-il simplement avec son seigneur, qui sait. Quoi qu'il en soit, une buzz électrique sonna, suivit de la voix du secrétaire de l'homme noir qui l'informait simplement que "quelqu'un voulait le voir." La réponse ne vint pas par des mots. A vrai dire, Reynal n'avait plus besoin de ce genre de bassesse humaine. Chaque jour, avec chaque nouveau fidèle, il héritait de nouveaux pouvoirs. Pas de toute, il était bien le messager rouge. La porte du bureau s'ouvrit et un officier portant la marque de l’œil se présenta. Il tremblait, imperceptiblement, se tenait les mains comme un enfant honteux. L’œil du Roi se retourna vers lui avec un large sourire bonhomme et, du ton le plus aimable qui soit, l'invita à s’asseoir sur le siège prévu à cet effet. "Alors Jimmy, car c'est bien ton nom, n'est-ce pas ? Quelle nouvelle viens-tu m'apporter ? L'officier inspira. Il allait répondre, même s'il avait l'intime conviction que c'était inutile, que le marcheur savait déjà. -N-... Nous avons captés des ondes provenant d'une planète lointaine et, heu... Eh bien, ça ressemble à une sorte de capitale galactique. Un lieu de discussion entre plusieurs peuples. Reynal fit claquer ses mains l'une contre l'autre et s'esclaffa bruyamment. Son sourire, déjà étiré à son maximum, sembla s’agrandir encore un peu. Ses yeux brillaient comme deux fours crématoires. -Dis-moi, Jimmy. Tu es bien né dans la ville d'Akenont, dans la région d'Eliezona ? C'est bien. J'ai toujours aimé les gens de ce coin. C'était un bon lieu, par le passé, avec des grands champs, un beau ciel... Les gens y avaient vraiment la main sur le cœur, en leur temps. Il laissa planer un court silence durant lequel il sembla réfléchir puis reprit soudainement. -Vas-donc rejoindre tes petits camarades, Jimmy. Nous ne communiqueront pas avec des gens qui ne peuvent pas influer sur notre très sainte lutte, non, mais nous les observerons. Comme tu le savais déjà, n'est-ce pas ? -O... Oui monsieur." Puis, sans attendre son reste, l'officier quitta la salle et partit rejoindre "ses petits camarades". Reynal Farwall, pour sa part, ferma les yeux et d'un geste commanda à la musique de monter de deux crans en volume. Une assemblée galactique ? Intéressant. Il avait toujours trouvé très amusant les efforts des autres êtres vivants pour construire des choses durables, alors même que tout était finalement voué à l'entropie, au refroidissement général. Lui, il construisait quelque-chose, mais cette chose avait pour seule fin de disparaître. C'était un cycle, voyez-vous, un cycle éternel que son maître respectait à la minute près. Celui de la grande destruction. L'homme noir eut un soudain éclat de rire qui, semble-il, résonna à travers toute la Ziggourat, traversa la ville, survola le grand fleuve et se dispersa dans l'air comme une pensé maligne, un éclat de démence contagieux et aussi brutal que bref. Il avait beaucoup à faire.
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