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Astructuration de la planète N°9.7.16.5.1

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Cdt. O-
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13/01/1017 ETU 12:33
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La vie en Secteur 7 est rude, et remplie de tourments. Bien sûr il y a quelques petites planètes encore indépendantes, qui ont à peine conscience de la présence d'autres civilisations beaucoup trop près d'elles, et sur certaines d'entre elles on ne vivote pas trop mal, mais l'immense majorité de ce genre de mondes isolés est sous la coupe de brigands au réseau massif et tentaculaire, dont on murmure qu'il contrôle les moyens secrets de voyage dans toute la galaxie, et même dans tout l'univers...
Quelques autres puissances se disputent les quatre-cent planètes du Secteur, et pour la plupart, elles n'arrangent en rien la situation des peuples qu'elles asservissent : Kalebb, le seigneur-marchand local, suffisamment puissant pour avoir obtenu la Contrebande fondée par les brigands, ne répond qu'à la loi du profit et la dicte à tous ses administrés, dont l'immense majorité souffre donc dans leurs efforts effrénés pour alimenter un capitalisme qui n'a plus de limites. Eileen, une femme mystérieuse qui se moque pas mal du sort des loqueteux qu'elle peut assimiler, fait s'étendre un labyrinthe de tunnels organiques qui contaminent tous les mondes qu'ils touchent, et vous mettent dans l'équivalent d'un système digestif géant, rempli d'horreurs. Les légions de Lord B fuient la guerre après avoir survécu à leurs sanglantes défaites, en un autre temps et un autre lieu, et avec les quelques mondes silencieux qui parsèment le Secteur, il ne reste guère que l’Émirat Dhakirite pour apporter un peu de civilisation et de paix dans ce marais morose, malgré l'aridité de ses mondes et de son mode de vie.
Si seulement la liste s'arrêtait là.
Dans les recoins du Secteur, dans des systèmes et sur des planètes où personne ne se rend et dont personne ne veut discuter, il y a... quelque chose. On ne sait pas trop quoi au juste. Dans ses endroits, on assiste à des manifestations cosmiques qui font se demander si l'on est devenu fou, si c'est le monde qui est en train de le devenir, ou s'il l'a toujours été, simplement. Des hommes aux visages sombres et éteints voyagent parfois depuis ses mondes, et personne ne les questionne à leur propos. On s'accommode de la proximité de l'Ombre, voilà tout, et on évite de la regarder de trop près, de peur qu'elle ne regarde en retour. On dit que les mondes dont elles semblent provenir tombent rapidement, sans prévenir, comme ça. Sans tomber, en fait. Comme s'ils étaient déjà abattus, que la présence ne s'installait là que parce qu'elle y était, au fond, depuis longtemps.
La planète 9.7.16.5.1, jungle dense sous la domination du cartel local, avait à peine entendu parler de civilisation. Sa seule loi était celle, non pas du plus fort, mais bien évidemment celle du plus malin. Quelques petits bouts d'Islam colorait un peu la culture locale, grâce à l'influence du bienveillant Abu Safâ, mais autrement, il ne s'agissait que de milliards d'âmes livrées à la pauvreté et à une survie toujours plus difficile sur une planète pourtant pleine de vie. Juste assez de technologie pour travailler pour le compte des brigands. Beaucoup de population, mais sans but ni espoir. Peut-être que quelqu'un aurait pu leur apporter une vie meilleure, quelque chose à construire, des mondes à rejoindre pour grandir. Peut-être que les graines du savoir auraient pu germer dans ce paradis en friche. Ce fut toutefois l'Ombre qui, la première, étendit son influence dans ce recoin de l'espace.
(Musique d'ambiance extra-diégétique : https://www.youtube.com/watch?v=HY_IO9eGzSk)
Tout commença par la dessiccation totale d'une planète voisine, qui commerçait un peu de diamant de temps en temps en échange de la sécurité face aux brigands. C'est quelque chose qui avait étonné Marys, qui ignorait qu'une planète pouvait juste mourir, comme ça. Bien sûr, la sienne était plus que vivante, la jungle d'or et de mauve qui s'étendait sur tout son pourtour assurait un climat florissant, mais tout de même. Une planète qui meurt. Ça vous fout froid dans le dos.
Dans le hangar à teinture dans lequel Marys travaillait pour gagner les quignons de pains que les brigands voulaient bien lui jeter, les ouvriers murmuraient à propos de ça. Les rares qui disposaient d'un holoviseur pour assister aux retransmissions de l'Assemblée Galactique parlait d'une malédiction, ou d'un fantôme, ou d'une ombre. De rumeurs d'apocalypse, et d'un cercle, un grand cercle dans le ciel, et dans le vide. Un trou, un O parfait dans lequel tout risquait de s'effondrer. Une ouverture s'était même faite en pleine Assemblée, retransmise dans toute la galaxie! Même les riches n'étaient donc pas à l'abri. Marys pensait que ce qui se passait à l'Assemblée Galactique, ça ne les concernait pas, mieux valait s'occuper de ses quotas et des coups de taser qui l'attendaient s'ils n'étaient pas remplis. Dans l'atelier, les types murmuraient que c'était l'Ombre qui avait mangé en un seul coup la planète que tout le monde appelait maintenant Dessiccation, tant elle avait été brusquement desséchée. Même les brigands fermaient leur gueule pour une fois, au lieu de cogner ceux qui causaient au lieu de bosser. Pour Marys, rien que des conneries tout ça.
Un certain nombre de cycles plus tard, une des planètes satellites de 9.7.16.5.1. avaient vu toute sa faune se dégrader brusquement.
L'Ombre, cette fois-ci tout le monde l'aurait juré. Les brigands eux-mêmes semblaient inquiets, et tandis que les travailleurs se faisaient peur les uns aux autres en imaginant ce qui se passerait si ça se produisait sur leur propre planète, Marys observait le dos des gardes, qui avaient eux-mêmes trop peur pour jouer correctement les séides. Ils fixaient le ciel, fixaient le ciel en murmurant "O Farâgh! Ca vient de l'espace O Farâgh, les marchands obscurs, y'a que les arabes qui osent faire du commerce avec eux parce qu'Allah les protège. Le chef, il dit que les marchands obscurs se sont fait manger l'âme...". Marys crut même distinguer quelques prières musulmanes extrêmement mal prononcées. Rien de mieux que la peur pour planter les graines de la religion.
Ainsi que celles de la révolte.
Quelques cycles plus tard, 9.7.16.5.1 a pris feu. Les brigands avaient lancé un certain nombre d'offensives sur Dessiccation et Dégradation, offensives qui avaient disparu sans laisser de traces. Des milliers de frégates corsaires et tous leurs équipages, disparues sans laisser un seul bout de métal. La moitié des bourreaux de 9.7.16.5.1 avait fichu le camp de là et rejoint des points de coordonnées plus propices, quand certains n'avaient pas carrément fait sécession pour s'enrôler dans les légions de Lord B. On disait même que les plus superstitieux avaient trouvé refuge dans les tunnels dévoreurs d'Eileen, estimant qu'au moins, les horreurs qu'ils auraient à affronter là-bas seraient plus identifiables que la menace sourde qui grondait sur leur tête.
Tout ça, encore une fois, ne concernait pas Marys. Parce que l'autre moitié des bourreaux, c'était à elle qu'on avait mis le feu. Le peuple enragé et apeuré, ne tenant pas à subir le même sort, s'était soulevé contre ses oppresseurs et Marys avait baigné dans le sang d'un millier de malfrats, sans savoir si tous les coups de clé à molette qu'il avait donné lui avaient fait du bien ou non. Certains révoltés agissaient par peur des brigands, d'autres craignaient l'Ombre. D'autres mêmes, encore plus allumés, la voyaient comme la vengeance divine contre les méfaits des brigands, une petite revanche de l'univers que Dieu avait décidé d'envoyer sur les pêcheurs. Pour Marys, Dieu n'était qu'un fainéant qui, tout au plus, avait dû laisser traîner quelques chasseurs furtifs quelque part pour garder un œil sur sa création, mais ça ne l'intéressait pas. Tout ce qui l'intéressait, c'était d'être libre. Quand tous les brigands seraient morts, ce serait le cas. L'Ombre n'était qu'une légende stupide, un racontar de spatioport un peu trop grossi. Sur 9.7.16.5.4, la planète voisine, tout aussi luxuriante, le même genre de révolte avait eu lieu. Le sang avait coulé à flots, mais l'avenir s'annonçait radieux.
Cette fois-ci, on ne savait même pas ce qui s'était passé. 9.7.16.5.4 avait simplement cessé d'émettre, et tous les capteurs semblaient la prendre pour un trou noir miniature, une boule d'entropie. Dans le point de coordonnée 9.7.16.5, il n'y avait plus que la planète de Marys à être encore en vie. Ça ne le concernait pas, parce que plus rien ne concernait Marys. Ses quelques amis et bouts de famille, ce qui lui donnait l'impression que sa vie était importante, avaient été tués après les émeutes. Sacrifiés. A l'Ombre.
Il faut croire que les gens habitués aux bourreaux ont besoin de s'en retrouver un. Ça devait être pour ça qu'après la fuite des derniers brigands, un culte était né des cendres de leur pouvoir, un culte envers la chose, dont les fidèles avaient décidé qu'elle se nommait "O-", même si quelques pseudo-musulmans ayant renoncé à leur foi conservait l'habitude de l'appeler "Sheitan". Des cercles peints ou taillés aux tirs de canons fleurissaient sur toute la planète, dont toute la structure s'effondrait brique après brique. Marys n'avait plus rien à espérer ici. Il ne restait qu'à s'isoler, se réfugier dans les dernières parties inhabitées de la jungle. Depuis son cabanon, Marys pouvait apercevoir les vieux bâtiments transformés en temples nihilistes où l'on massacrait à tour de bras pour les décorer d'immenses O rouge sang. Ils avaient dû trouver de vieilles armes biologiques dans les caissons laissés par les brigands, parce qu'ils répandaient des pestes dans toutes les plantes pour mieux vénérer leur divinité destructrice. La jungle mourait par cercles concentriques. Du reste, qu'y avait-il à espérer à se battre contre le culte? S'ils perdaient le contrôle, les brigands reviendraient et retrouveraient leur domination. Au moins, ils s'étaient trouvé une joie dans le fait de décider de ce qui les tuerait. Peut-être qu'ils avaient un peu raison, qu'une force cosmique balayait ce petit coin de l'espace-temps. Marys entretenait parfois le désir de fuir la planète, mais sans savoir où il faudrait aller, alors ça ne servait à rien.
Quand Marys se réveilla une dernière fois, il n'y avait plus rien. Errer dans la jungle ne lui montrait que des plantes mortes ou étrangement tordues, déstructurées, qui avaient dû être détruites par les armes récupérées par le culte d'O-. D'eux, pas une trace, mais les monticules noircis que l'on pouvait distinguer au loin et la cendre qui neigeait sur toute la planète tendait à lui faire penser qu'ils s'étaient tous immolés à la gloire de leur propre destruction. Marys se rendit compte que rien de tout ça n'avait de réelle importance, de réel impact pour sa vie. C'était la vie d'autre chose qui s'était éteint. De la sienne, il ne restait qu'un lambeau sans cohérence. Une astructure. Tout juste assez de fibres pour dessiner un joli rond.
Marys leva la tête vers le ciel une dernière fois avant de se forger un gros trou en forme de O dans le crâne, avec sa vieille clé à molette. Dans le ciel, une éclipse blafarde faisait briller un oeil noir sur la planète déformée, encerclé par un grand cercle lumineux former par la brillance d'un soleil plus pâle qu'à l'accoutumée. Une ombre passa sur le cadavre de Marys, avant la fin. Quand on est mort, plus rien ne nous concerne.
"Succès du ralliement diplomatique de la planète Astructuration (9.7.16.5.1)."

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