Morganne avait enfin déniché le commandant Orishas et ele se fit annoncer par précaution. Précaution pour lui... elle était dans une fureur noire !

Quand les gardes l'amenèrent près du hamac qui se balançait doucement, elle les congédia d'un geste autoritaire. Puis elle se campa devant le pirate alangui et un feulement se fit entendre.

Elle donna un grand coup dans le hamac qui se renversa, faisant chuter durement le renégat à terre.

Elle releva d'un geste nerveux le commandant qui rampait lamentablement dans les vapeurs de rhum et le regarda à quelques centimètres, les yeux dans les yeux.

Larguez les amarres rats de cales! On a un trésor à découvrir!

Devant l’air hagard du pirate, Morganne eut un sourire. Pendant ce temps, l’équipage s’était arrêté de bosser. On larguait les amarres ? Mais c’était pas prêt ! Quand elle s’en aperçut, la lionne gueula de se remettre à charger les cales. Elle repoussa un peu Orishas dont l’haleine chargée la dérangeait un peu.

Elle le regarda partir, il tanguait un peu, mais elle savait que le lendemain, il serait à son poste, fier et noble comme à l’accoutumée…. Avec une bonne gueule de bois ! Donc, de mauvaise humeur…

Campée au milieu du tarmac, elle continua à suivre les préparatifs du départ avec vigilance. Puis elle donna quartier libre à l’équipage pour quelques heures. Ils savaient tous qu’elle serait là à leur retour et que la Danae serait inaccessible passée l’heure prescrite et qu’ils perdraient leur place.

Puis elle monta lentement dans le vaisseau, soudain consciente de sa fatigue. Elle passa par les cuisines pour demander si le Capitaine avait eu un repas décent, puis elle alla s’allonger avec un plateau froid dans sa chambre.

Elle commençait à rêver de ce voyage.

Par où commencer ?

Dans la taverne fermée, Jenah avait déroulé les cartes stellaires en sa possession sur la table vide. L’une d’elle portait une petite déchirure, comme une porte ouverte sur un monde parallèle. Orishas buvait beaucoup, comme d’habitude, et bientôt, plutôt que de chercher patiemment l’itinéraire le moins dangereux, de calculer les horaires et les dates de vol, les escales, les trois compagnons commencèrent à plaisanter, à faire dériver leur imagination sur les fameuses Tables du Code.

Morganne regardait tour à tour avec plaisir les yeux brillants de Jenah et ceux rêveurs d’Orishas. La jeune rénégate les régalait d’anecdotes ramenées de ses nombreux voyages et Morganne s’amusait à mimer la fureur d’un capitaine, la terreur d’un marin, le chant des sirènes, les tempêtes….

La porte de la taverne s’ouvrit lentement tout à coup et elle leva la tête en direction de l’entrée. Ils n’attendaient personne à sa connaissance. La silhouette d’ombre qui s’avança la fit bondir sur ses pieds. Elle ne riait plus. Son regard glacial avait repris cette fixité qui la faisait paraître dangereuse, ce qu’elle était.

Morganne souffla en direction du pirate :

Le sourire alangui et heureux d’Orishas lui répondit. Morganne le maudit intérieurement et se rassit, en lui sifflant des insultes bien senties. Puis elle cracha par terre tout le venin qui affluait dans sa bouche et serra les dents. Elle avait remarqué le geste de la commandante Wang, aussi surprise qu’elle de cette rencontre.

Avant que quiconque ne parle, Morganne montra les dents.

Puis elle se tourna vers les deux autres.

Elle se leva pour partir, s’arrêta à quelques centimètres de la commandante Cornélia comme si elle allait ajouter quelque chose, puis la dépassa et sortit sans rien dire.