Ambiance mélancolique, lumière tamisée, soir.

L'enseigne était réputée. C'était un lieu d'importance dans l'histoire artistique et politique de l'Empire. La majorité des hommes qui étaient devenus les ministres et conseillers d'Alyse, ses premiers partisans, se réunissaient dans certains lieux publiques pour réfléchir, discuter et débattre sur la situation de l'Empire. Ce bar faisait parti de ces nombreux point de rendez-vous et avait donc acquit statut de lieu sain politique.

Ainsi qu’accessoirement le lieu de détente privilégié des rares politiciens qui pouvaient se permettre de faire des apparition en civil. Dans une nation s'acharnant à iconiser son gouvernement, les hommes et femmes appartenant à cette caste étaient rare. Une sorte de solution de compromis avait finalement fait son apparition avec le temps : Si le bar demeurait un espace publique, il était, dans l'esprit des gens, le domaine réservé des politiciens. Il fallait cependant avouer que son positionnement -à proximité du sénat et du palais impérial, dans les quartiers huppés- et que son standing -les premiers partisans d'Alyse n'étaient pas tous des génies sans le sous- aidait sans doute.

Scylla était au bar, elle n'était pas seule. Il y avait une sorte de réception : Des officiels occupaient l'espace, installés aux tables, dans les loges, discutant silencieusement de choses et d'autres, riant parfois au éclat, écoutant distraitement la petite bande de musicien installé sur un promontoire, à l'opposé de l'entrée, face au comptoir central. L'ambiance avait un petit quelque-chose d'étrange, d'onirique. Peut-être était-ce à cause de la décoration définitivement très film-noir, avec ces vastes rideaux, cette omniprésence du bordeaux et du noir, ces musiciens et ces chuchotement. Le tout était aussi assaisonné d'une pointe d'électricité ambiante : Nul n'ignorait le caractère proprement incertain de la situation galactique, à quel point tout pouvait basculer, changer d'un moment à l'autre.

Le barman approcha du comptoir et écouta la militaire lorsque celle-là lui fit par de sa consommation. Il fit signe à une serveuse d'amener ce qu'avait commandée Scylla. Celle-là fit signe à l'homme de directement lui confier le plateau, ce qu'il fit. Scylla traversa ainsi la foule de casquettes et d'uniformes, plateau posé en équilibre sur la paume de sa main gauche, s'arrêtant parfois pour très brièvement saluer un officier qu'elle connaissait ou un diplomate du quatrième ou cinquième district colonial, perdu de vue depuis sa prise de poste. Il était globalement admit et reconnu qu'en dehors de ses heures de boulot, Scylla était une femme d'une remarquable gentillesse. Seul problème : Elle travaillait souvent, et adorait ça.

Dépassant le promontoire où se trouvaient les musiciens, la militaire contourna une table, évita une serveuse qui effectuait le chemin inverse à celui qu'elle empruntait, et disparu au creux d'une loge où l'attendait l'exarque Lautrec, non sans rendre un sourire à un officier avec lequel elle avait travaillée lors de l’opération dératisation. Il y avait une table circulaire sur laquelle elle posa le plateau et des canapés bordeaux l'entourant, sur lesquels elle se posa.

Contrairement à la majorité des officiels présent, elle avait laissée tombée l'uniforme au profit d'un imperméable rouge sous lequel elle portait un ensemble chemise pantalon de costume d'une élégante simplicité.

"Nous qui voulions avoir la paix..."

Elle ferma les yeux et inspira, plaçant ses mains derrière son crâne, comme si elle acceptait avec philosophie un fait immuable. Une sorte de "C'est la vie."

"J'aurai dû me renseigner avant de décider qu'on se rejoigne ici. Ça ne vous dérange pas trop ?"

Le haut chevalier remercia Scylla par un faux sourire.

Il récupéra la commande qui lui était destiné, un verre de Whiskey classique. Son regard se perdit dans son verre. Le Haut chevalier avait opté pour une tenue simple lui aussi. Une veste en cuir épaisse posée sur le côté. Il portait un haut confortable, gris et à manche longue, un pantalon noir avec deux chaines accrochée de chaque côté.

Il remua un instant le contenu de son verre avant de lancer un regard circulaire dans la salle. A l'arrivée de Wotek. Lautrec fit un signe de main plutôt mollasson à son attention.

- Salut Wotek.

Il replongea dans un court mutisme, ses oreilles se focalisant sur le rythme de la musique diffusée dans le bar impérial. Il releva son regard déprimé vers Scylla.

Lautrec lâcha un soupir nasal. Il lança un regard à Wotek.

Nouveau soupir, il prit une gorgé de son verre.

Il eut soudainement un léger sourire. Comme si une pensée amusante était venue le tirer momentanément de sa mélancolie.

Lautrec eut un silence coupable. Il échangea un regard Avec Scylla. Un regard plein de mélancolie.

Il posa un pistolet sur la table. La poignée tournée vers Scylla.

Il bu d'une traite le liquide dans son verre. Le posant sur la table avec une main tremblante.

Il eut un rire nerveux. Inquiet même.

Son regard fit face à nouveau à Scylla.