Cdte. Léthé
Respect diplomatique : 363 02/12/1019 ETU 22:53 |
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Score : 13
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Maintenant, il est temps de conclure. Léthé se lève à nouveau. Cette fois elle sourit franchement. Cher Aspen Vegas, Vous avez quitté le confort et la démesure de Floston Paradise pour me rejoindre sur cette planète austère. Vous avez accepté que l’entretien se déroule selon mes termes. Malgré le côté sinistre de l’endroit, vous avez conservé votre entrain et contribué à rendre vivant cet ultime dialogue qui est en quelque sorte mon testament. Du fond du cœur je vous dis merci. J’imagine que plus personne ne doute que j’ai un cœur ? Aspen. Ce sont mes derniers moments. Tout le monde l’a maintenant compris. Je suis heureuse de les avoir passés avec vous. Vous m’avez considérée… comme une personne. C’était le plus beau cadeau qu’on puisse me faire. La Capitale va changer de main. Je vais la donner à celle qui a cru en moi et qui m’a permis d’y mener mes recherches. Celle qui a donné une chance au secteur 2 d’arriver ici en premier. Mes drones vont vous raccompagner à votre vaisseau. Puis ils se chargeront des derniers transferts de planètes et des ultimes démarches administratives. J’ai un cadeau pour vous. Il s’agit évidemment d’un scoop. Le suicide en direct d’un IA. Adieu Unité. Vivre ici fut une belle expérience. J’ai rencontré nombre de commandants courageux. Je sais qu’ils n’accepteront pas qu’on leur impose un destin. Je sais qu’ils auront à cœur de s’inventer un futur, sous le signe de la liberté. Un bruit, similaire à celui de la dissolution d’un comprimé effervescent, commence à se faire entendre. La peau de Léthé se met à diffuser un nuage grisâtre, couleur de cendre. Elle s’avance, un peu chancelante, et prend le visage d’Aspen dans ses mains. Ses lèvres se posent sur sa bouche. Aspen ferme les yeux. Quelques instants après, Aspen ne sent plus rien. Léthé a disparu. Dans la grande salle de l’Assemblée Galactique flottent quelques flocons de poussière.
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Cdt. Aspen Vegas
Respect diplomatique : 339 03/12/1019 ETU 23:29 |
Score : 6
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Tout alla très vite en ces derniers instants. Avant qu'il n’eût l'occasion de lancer une de ses blagues potaches habituelles, l'IA avait conclu une émission particulière dense et riche. Il fallut à peine quelques secondes à Aspen pour comprendre ce qui allait se passer. Il aurait voulu dire quelque chose, faire jouer son charme, sa bonne humeur, proposer des projets fous, des solutions ingérables, des idées farfelues ou illogiques, tout ce que son raisonnement humain et imparfait aurait pu trouver de stupide pour tenter de la convaincre d’abandonner son projet suicidaire. Mais quelques secondes à l'échelle d'une IA c'est déjà trop. Des raisonnements de ce genre, des plans fous et bien mieux, en quelques secondes, Léthé en avait pensé, implémenté et simulé des milliers. Sur les 14 000 605 futurs que l'IA avait visité en pensée, elle n'en avait tiré qu'un seul d'acceptable et Aspen ne le comprit que trop tard, lorsque les lèvres de Léthé effleurèrent les siennes. Il aurait dû lui attraper la tête, lui caresser les joues, plonger dans ses yeux, crier son nom.... mais non. Réflexe humain primitif : il ferma les paupières comme pour se protéger d'un danger inexistant. C'est donc les yeux clos qu'il entendit le bruit effervescent de Léthé qui mourrait. C'est les yeux clos qu'il sentit fondre les lèvres de l'IA. C'est les yeux clos que le silence autour de lui se fit. 50 millisecondes environ furent nécessaires à ses nerfs pour ne plus sentir de contact. A peine une dizaine de plus pour ses oreilles d'entendre le bruit du silence. 100 millisecondes plus tard, son cerveau eut fini d'analyser la sensation et d'en discriminer la cause, une poignée plus tard le stimulus de réponse était décidé. Un humain est lent par nature, trois fois plus furent nécessaires à ses muscles pour que la réponse motrice puisse être accomplie. Durant ces 364ms au total, Léthé avait envoyé des ordres de cessation de la Capitale, de ses planètes, ordonné ses affaires, donné des instructions à ses lotophages, et... avait disparu. Aspen resta là, interdit, muet. Il avait oublié le direct, oublié ses auditeurs, oublié le monde. Marine dût envoyer une coupure pub, et c'est un Apsen hagard que l'on escorta machinalement à son vaisseau. Il venait d'assister non pas à un suicide, mais à des milliards : en direct, dans son GreenWasher, c'était des milliards de milliards de lotophages qui disparaissaient. Le monde serait-il toujours green après ça ?
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