La Druidesse suivit l'allocution sirupeuse de la Commandante Sclavus avec la rage au ventre. Elle la suivit ensuite auprès du distributeur d'eau et envoya d'un revers de main valser le gobelet qu'elle venait de se servir.

Azalée remplit elle-même un verre d'eau qu'elle tendit à Elise Sclavus.

Elle sourit dans un énorme effort.

"J'ai bien peur que les liquidités soient monnaie courante en ce lieux mal famé."

L'impératrice nous honore par son retour. La morosité qui règne en ces lieux sera sans nulle doute dissipée par son illustre présence.

Cependant, avant son absence prolongée, l'impératrice était plus encline aux safaris sanguinaires qu'à empêcher le sang de couler. Il lui était tout autant inhabituel d'utiliser la censure. Sa grandeur daignerait-elle nous rassurer quant à son intégrité mentale et nous expliquer le cheminement qui a mené à ce radical changement ?

Commandants et commandantes de Sagesse.

Je ne prends la parole ici que pour démentir toutes les accusations éhontées prononcées contre la république autoritaire librianne dans ce qui s'apparente à de la censure au sein de l'assemblée galactique.

Nous n'avons rien à voir là-dedans et pour être tout à faits honnêtes, je n'ai personnellement pas eu l'opportunité de consulter les allocutions qui ont étés effacées des archives.

J'ajouterai en terminant qu'avec tout le respect que je voue à Pandore, à l'empereur Eyser, de même qu'à l'impératrice Sclavus, je désapprouve fortement l'emploi de telles méthodes de contrôle de l'information. Je souhaite de tout cœur que les textes retirés puissent être rendus aux archives galactiques et soumis à l'attention générale et que de tels procédés ne soient plus mis en place sans l'accord des chefs d'états de Sagesse.

Merci à tous.

Derrière l'écran holographique de son ordinateur, Dragunov rageait sourdement. Il était révulsé. Non pas de voir Azalée ainsi spoliée ; au fond, le filtrage des informations embarrassantes était totalement normal à ses yeux. C'était le fait de SE voir ainsi dépouillé d'une discussion dans laquelle il pouvait affirmer a présence de sa Nation et de sa propre personne.

Enfin, il grondait mais gardait son sang-froid. Sur son visage éternellement fermé, seule sa lèvre était légèrement relevé – ce qui était un signe de mépris et de vexation extrêmement profond. Il fit rallumer le réflecteur holographique, signifiant à Alisa – sa porte-parole officielle, sa voix – que, pour une fois, il allait s'adresser lui-même à l'Assemblée.

Il se leva pour apparaître debout, du haut de toute sa stature d'homme autoritaire. Tout comme lors de sa précédente apparition, le silence se fit ; on put distinguer comme un frémissement dans l'air de l'hémicycle. Cette fois cependant quelques murmures s'élevèrent ; pourquoi n'avait-il pas la gamine à côté de lui ? Allait-il parler, ou tous les percer un par un du regard ? Ils découvrirent bien vite qu'ils auraient préféré que l'effrayant Commandant ne dît rien, tant sa voix, gutturale et marquée d'un accent slave, était difficile à souffrir. Pas de ton, pas de fluctuations ; juste un ton froid et monocorde pourtant empreint d'une implacable volonté, insoutenable et captivant à la fois.

Il laissa planer un silence pesant, ses yeux tranchants glissant de personne en personne. Plusieurs d'entre eux, notamment ceux qui avaient pris la parole suite au coup d'éclat de l'Impératrice, se montraient digne de son mépris diplomatique : n'avaient-ils donc aucun sens du calcul ?

L'image disparut comme elle était venue, laissant un instant de stupeur. Enfin les murmures, puis les vives discussions, reprirent – on était soulagé du départ de cette présence incommodante.