La situation ne plaide pas en votre faveur. La découverte récente de votre taverne secrète intitulée Garde Noire montre que vous aviez préparer votre trahison depuis longtemps. Seul un véritable changement en matière de politique, et je parle bien ici de la reconnaissance officielle du gouvernement provisoire pourra vous rendre un semblant de dignité.

Je prends acte, avec regret, de la dernière déclaration du représentant de la coalition impériale.

Outre l'injure qui m'est faite, en qualifiant mon action, je cite, " d'opportunisme grossier ", je constate que la confiance est rompue.

Si sa majesté l'empereur ne désire plus de moi comme chancelière, je lui remettrai ma démission. Je ne peux assumer cette responsabilité sans sa pleine confiance.

Je note également que l'empereur revient sur sa parole. Il avait pourtant accordé son pardon à tout belligérant de l'autre camp désireux de se retirer du conflit. J'ai vraisemblablement fait preuve de naïveté quand le Consortium Orah a demandé le pardon impérial, que je m'estimais en droit d'accorder, en qualité de chancelière, au nom de l'empereur. Je me suis trompée sur l'étendue de mes prérogatives, visiblement plus limitées qu'escompté.

En outre, je prends acte de la volonté de la coalition impériale de saboter mon initiative consistant à faire de la capitale une zone neutre. Ainsi, les coalisés de l'empereur entendent se déclarer opposants alors même que le roi Nao n'a pas encore répondu à ma proposition.

Pire encore, la capitale sera envahie même si j'en assure la tutelle, alors que j'ai déclaré vouloir assurer cette tutelle temporairement, le temps que ce conflit cesse, afin que toutes les parties disposent du droit de s'exprimer librement devant cette assemblée.

Me voyant ainsi insultée et mise en doute, mes propositions foulées au pied et jugées médiocres sans même recevoir de contre-propositions, je ne vois pas comment, en l'état actuel des choses, je vais pouvoir continuer mon travail.

Si l'empereur, je le répète, ne veut plus de moi comme chancelière, qu'il le dise. Je ne peux guère travailler dans ces conditions.

Après tout, je n'ai jamais rien exigé pour ma personne. Je gère tranquillement une petite soixantaine de planètes, j'emmène mes gosses à l'école tous les matins, je joue aux cartes avec les copines après les heures de boulot, et je me dispute avec mon incapable d'époux une fois tous les samedis. Votre opportunisme grossier, votre majesté impériale, il faudra m'expliquer en quoi il consiste, car depuis mon secteur fermé, je ne vois vraiment pas.

Les cimetières galactiques sont remplis de gens indispensables. Les poubelles de l'Histoire aussi.

L'hologramme de Dame Nereis apparut en début d'après-midi tandis que tout le monde prenait son heure de table. C'était calculé. Elle n'avait pas eu le temps d'enfiler son débardeur déchiré. Il lui fallait environ une heure de travail pour passer la tête et les bras (et les seins) dans les bons trous sans déchirer plus avant le morceau de tissu en lambeaux. Par conséquent, elle n'avait qu'un pull-over en laine moulant hyper-classic qui ne correspondait pas du tout aux canons du Now is the new Before, et elle se considérait donc comme inmontrable. Elle prit la parole:

Lorsque vous remettez - je cite - "officiellement en cause la neutralité affichée de la commandante Marie Chantale", et que vous voyez plutôt "un opportunisme des plus grossiers", tout en saluant la volonté de Marie-Chantal "d'arriver à la paix", nous ne voyons que contradictions dans vos propos. Or comment questionner la "neutralité" de la Cdte Marie-Chantal alors qu'elle n'a jamais pris de parti dans ce conflit?

Nereis s'arrêta un instant. Elle sentait son cœur battre à tout rompre. Défendre ainsi une position neutre dans un conflit galactique donnait un poids particulier à ses mots. Elle respira lentement et reprit:

Empereur Makarirus, je souhaite que vous m'expliquiez aussi d'où vous vient votre déception. Je vous cite: "La coalition impériale se trouve très déçue des propositions de Marie-Chantal, qui tendent clairement à favoriser la monarchie en tentant de faire oublier ses actions passées." Il ne nous a pas semblé que la Cdte Marie-Chantal s'efforçait de blanchir le Roi Nao de ses actions passées, ni vous-même des vôtres, soit dit en passant.

Enfin, lorsque vous dites - je cite - : "Nous rejetons donc toutes ces propositions et attendons de réelles avancées si ce gouvernement de tutelle souhaite réellement parvenir à la paix", je me demande de quelles "avancées" vous voulez parler.